Jugés par le tribunal correctionnel de Paris, les footballeurs Franck Ribéry et Karim Benzema ont été relaxés le 30 janvier 2014.
Les deux hommes étaient jugés pour avoir recouru aux services d’une prostituée mineure, Zahia Dehar, 17 ans : un délit passible de trois ans de prison et de 45 000 euros d’amende. Il a donc suffi aux prévenus de dire qu’ils ignoraient l’âge de la jeune fille pour être innocentés. Le verdict n’a surpris personne. Il illustre la complaisance collective pour les « clients », surtout s’ils sont riches et puissants.
Selon la loi de 2002, pourtant, le simple fait que la personne allègue que le mineur prostitué lui a affirmé être majeur ne paraît évidemment pas pouvoir, sauf circonstance particulière (comme le fait de montrer des documents d’identité falsifiés), être considéré comme un motif raisonnable d’erreur.[Source : Ministère de la Justice, [Présentation des dispositions de droit pénal de la loi n° 2002-305 du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale.]]
Le juge d’instruction André Dando n’a d’ailleurs pas manqué d’avancer que Ribéry ne pouvait se méprendre sur la minorité de Zahia car une prostituée mineure ne pouvait que dissimuler son âge au risque de réduire à néant son activité.
Malgré tout, la subjectivité des prévenus l’a emporté sur les faits. Ici, le présupposé juridique est l’irresponsabilité des « clients ». Nulle part n’apparaît le devoir de protection d’une mineure en danger. Qui s’est seulement demandé comment elle avait atterri à 17 ans dans les bars à prostitution ? Le seul débat autour de sa personne a porté sur… son apparence ! En revanche, le «client» est protégé. Il est supposé ne pas avoir la moindre question à se poser face à celle qu’il se pense en droit d’exploiter sexuellement, ne pas appliquer le moindre principe de précaution. Il lui suffit de dire qu’il ne connaissait pas son âge ; mieux, de laisser entendre que la jeune fille est une menteuse (c’est elle qui aurait affirmé avoir 18 ans)…
Cette affaire illustre la nécessité de disposer d’une loi d’ensemble qui responsabilise tous les « clients », quel que soit l’âge de la personne prostituée. Sans quoi, comme le dit l’association Zéromacho dans son communiqué intitulé Allez les Bleus, droit aux putes !
, ce jugement ouvre la voie à une logique évidente : Si cette décision fait jurisprudence, qu’est-ce qui s’opposera à la prostitution des adolescentEs de moins de 18 ans ? La justice ne donne-t-elle pas là un encouragement, non seulement aux footballeurs, mais à tous les prostitueurs ?
La loi actuelle pourra en effet être détournée sur la seule présence d’un maquillage habile. C’est dire si elle tient à un fil…