Génie du proxénétisme

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Suite à un appel d’offres de l’État soucieux de relancer l’activité dans une région anéantie par le chômage, un entrepreneur, Charles, a eu une idée de « génie » : la Cité. Ce qu’on y vend depuis cinq ans maintenant n’est rien d’autre que du sexe.

Inspiré du Génie du christianisme, ou beautés de la religion chrétienne de Chateaubriand, Charles Robinson propose son Génie du proxénétisme [ou beautés de la religion péripatéticienne] avec un découpage quasi similaire à celui de l’ouvrage paru en 1802. Mais en lieu et place d’une religion, son narrateur s’attache ici à défendre une pratique : la prostitution.

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Par endroits, l’auteur n’hésite d’ailleurs pas à renforcer son propos en détournant le texte original : « oui, chantons-la sans crainte cette religion sublime ; défendons-la contre la dérision, faisons valoir toutes ses beautés« .

Suite à un appel d’offres de l’État soucieux de relancer l’activité dans une région anéantie par le chômage, un entrepreneur, Charles, a eu une idée de « génie » : la Cité. Ce qu’on y vend depuis cinq ans maintenant n’est rien d’autre que du sexe.

Les désirs de tous y sont assouvis, la maison a même mis en place des systèmes de financement adaptés.
La Cité fait travailler des centaines de personnes : prostitués, hommes et femmes, coaches, psychologues, historiens de la prostitution, créatrices sexuelles chargées d’enrichir le catalogue des possibilités, décoratrices, etc.
Bien entendu, la région se porte mieux.

Durant 230 pages, Charles, le narrateur, se livre à une véritable apologie de l’entreprise, « ultime lieu de rêves et de dépassement« . Sans vergogne, tel un gourou, il nous vend sa soupe. Son vocabulaire ne trompe pas : « politique de pricing« , « rendement« , « traçabilité de la filière« , « personnel labelisable bio« , « hard discount« , « client consommateur« , bref, la prostitution version marketing.

Son but : banaliser la pratique, en faire un service à la personne. Et face aux partenaires que sont le conseil régional, le ministère de l’Emploi et l’Europe, Charles n’hésite pas à dézinguer les proxénètes et à vanter l’éthique de son entreprise qu’il veut modèle, défendant certes le plaisir du client mais également le bien-être du salarié. Si le propos n’était pas effrayant, il pourrait peut-être être drôle…

Pour éviter longueurs et redondances, le premier roman de Charles Robinson aurait gagné à être resserré. Néanmoins, il ne manque pas d’originalité. Se basant sur le principe de l’antiphrase, l’auteur se montre sans concession envers le discours de Charles et dénonce le cynisme de ceux qui, au nom du capitalisme et des logiques de rentabilité, justifient toutes les dérives, jusqu’à la marchandisation des corps.