Allemagne : une nouvelle loi qui ne satisfait personne

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Le 1er juillet, la nouvelle loi allemande sur la prostitution est entrée en vigueur. Issu du constat d’échec de la loi de 2002 qui légalisait la prostitution, rendait l’ouverture de bordels presque sans contrôle, et ne protégeait pas les femmes victimes de la prostitution, le nouveau texte ne satisfait personne.

Désormais, les personnes qui veulent avoir pour activité la prostitution en Allemagne, doivent s’enregistrer auprès des autorités locales, et passer une visite médicale dans une institution publique de santé. Cette mesure, qui rappelle la période hygiéniste en France au 19e siècle et début du 20ème, provoquerait, selon une association allemande, « un vent de panique » parmi les personnes. En effet, malgré le fait que la loi semble reconnaître la prostitution comme un « métier » comme un autre, elles semblent réticentes à  s’inscrire et que leur soit accolée l’image de prostituée.

Autre mesure phare de la loi, il sera désormais nécessaire d’avoir un permis pour ouvrir un bordel, et prouver que des conditions minimales de sécurité, d’hygiène et de santé sont respectées. Ainsi, il sera obligatoire qu’il y ait une salle de repos…et il ne pourra être demandé à  la personne d’exercer là  où elle dort. Enfin, les « gang-bang parties », actes sexuels perpétrés par plusieurs hommes sur une seul femme seront interdits, et le port du préservatif est rendu obligatoire.

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La nouvelle loi prévoit un cas où l’acheteur de sexe sera pénalisable : lorsqu’il achètera les actes sexuels d’une femme dont il est au courant qu’elle a été forcée à  la prostitution. Si cela se passe comme pour les « clients » de prostituées mineures, on peut douter que cela soit très efficace à  limiter la traite à  des fins de prostitution…

« Un monstre bureaucratique »

Les pro-prostitution ne sont pas satisfaits d’une loi qui selon eux met encore trop de bâtons dans les roues des personnes prostituées. Les associations abolitionnistes dénoncent de leur côté le fait que la loi, par la seule réduction des risques, ne prend pas en compte le fait que la prostitution est une violence, et pas un « service ». Pour Solwodi, notre partenaire dans la coalition CAP-International, cette loi n’aidera pas les personnes, mais ne fera que créer un « monstre bureaucratique ».

A peine entrée en vigueur, la nouvelle loi semble donc déjà  inapplicable dans un pays qui n’a aucune idée du nombre de personnes exploitées dans la prostitution (les estimations vont de 200 à  500.000). Censée corriger les insuffisances de la loi de 2002, elle paraît bien incapable d’y parvenir au point qu’on se demande surtout combien de temps elle mettra à  être remise en cause.Quant aux trafiquants et businessmen du marché du sexe, on peut malheureusement compter sur eux pour continuer à  favoriser l’époque du « client-roi » d’un marché qui vaut des milliards..