C’est dans le cadre des Journées des Femmes que Dennis Hof, le propriétaire multimilliardaire du Bunny Ranch, le plus connu de ses sept bordels du Nevada, se voit ouvrir à deux battants, le 11 mars 2015, les portes d’une institution aussi prestigieuse que la Sorbonne… L’homme pense saisir l’occasion d’un débat organisé par une association étudiante pour se faire connaître et ouvrir un « Bunny » à Paris. Prédisons lui, dès aujourd’hui, quelques bâtons dans les roues.
La semaine du 8 mars, on en a le souffle coupé. Un mac se voit donc désormais tranquillement invité, à l’université, au même titre que n’importe quel intervenant. Le débat, en anglais, sur la légalisation de la prostitution, opposera ainsi le défenseur de l’esclavage sexuel industriel à Julia Bindel, éditorialiste au Guardian, fervente abolitionniste n’ayant pas, par bonheur, la langue dans sa poche.
L’homme, en tournée mondiale – il a déjà sévi à Oxford University en Angleterre et au Trinity College en Irlande – est venu faire sa promo à Paris. Peu au courant, apparemment, des termes du débat en cours (la pénalisation des prostitueurs a relégué aux oubliettes la réouverture des maisons closes), il espère flatter ses auditeurs en vantant une « culture française » propice à l’épanouissement de la prostitution ; et au passage vendre son autobiographie à paraître le 17 mars : The art of the pimp tant il est évident qu’être proxo est un art.
On peut parier que le bouquin va être rapidement traduit. On se demande d’ailleurs quel proxénète n’aura pas publié le sien : Madame Lisa a eu les honneurs de la maison Grasset en 2012, Dodo la Saumure ceux de Denoël en 2013. Tous en ont profité pour s’exprimer abondamment dans les medias. Réduire en esclavage des femmes est aujourd’hui l’assurance d’être publié et respecté ; et ainsi de recruter des « volontaires » à la pelle tant la communication est travaillée au millimètre.
Heureusement, pendant que M. Dennis Hof s’échine à vouloir nous ramener au 19e siècle, des associations et des personnalités politiques s’emploient à nous faire entrer de plain pied dans le 21e : le 10 mars, à New York, dans le cadre de la 59e session de la Commission des Nations Unies sur le Statut des Femmes, la Coalition pour l’Abolition de la Prostitution a organisé un lancement international de l’Appel des Parlementaires pour l’Abolition de la Prostitution. Initié à Paris en novembre 2014, cet Appel a déjà été signé par 212 parlementaires de dix pays. Au final, Monsieur Dennis Hof pourrait bien être surpris par l’évolution des mentalités françaises, lui qui en est manifestement resté au folklore sur la fille de joie…