Vivastreet : information judiciaire pour proxénétisme aggravé

1742

Le parquet de Paris a décidé le 30 mai 2018 d’ouvrir une information judiciaire pour proxénétisme aggravé à  l’encontre du site de petites annonces sur Internet Vivastreet.

Le Mouvement du Nid, dont l’enquête Prostcost montrait en 2015 que 62 % des offres de prostitution étaient désormais promues par Internet. , se réjouit que la question soit enfin prise au sérieux, en cohérence avec la loi du 13 avril 2016.

La décision du parquet intervient après une enquête préliminaire menée depuis avril 2017 par l’Office Central pour la Répression de la Traite des Etres Humains (Ocrteh) à  la suite de deux plaintes : l’une des parents d’une jeune fille qui, à  14 ans, avait pu se faire passer sur Vivastreet pour une « masseuse » de 20 ans, l’autre du Mouvement du Nid qui accusait le site de proxénétisme puisqu’il tire profit de la prostitution d’autrui.

Annonce

Les proxénètes, y compris sur mineur.e.s, actuellement condamnés, ont le plus souvent utilisé les sites d’annonces de ce type. Non seulement les sites Internet favorisent l’exploitation sexuelle en faisant office d’intermédiaires mais ils en tirent des profits considérables malgré leur présentation comme sites d’annonces « gratuites ».

Selon un calcul effectué par le journal Le Monde, les 7000 annonces payantes postées dans la rubrique Erotica de Vivastreet (débaptisée depuis), hypocritement présentées sans tarifs ni termes explicites, représentaient un profit évalué à  11 à  21 millions d’euros annuels, ce qui plaçait l’offre de prostitution au cœur du « modèle économique » du site.

L’enquête ouverte contre Vivastreet s’inscrit en toute logique dans le projet de lutte contre le système prostitutionnel voté en 2016. Plus largement, il semble accompagner un mouvement de responsabilisation des sites quant aux contenus générés par les internautes. Aux Etats-Unis, le site Backpage a ainsi été fermé par le FBI en mars 2018 pour les mêmes raisons ; et la loi SESTA-FOSTA permet désormais aux victimes de traite sexuelle via des sites de petites annonces de les poursuivre devant la justice.

Enfin, fin mai, le parlement anglais a de son côté publié les conclusions d’un rapport d’enquête sur le proxénétisme en ligne qui pointait la responsabilité de Vivastreet. On peut donc espérer que le temps de l’impunité est en train de prendre fin.

Rappel – Que dit le Code Pénal ?

Le code pénal (article 225-6) qualifie de proxénétisme « le fait, par quiconque, de quelque manière que ce soit :

  • De faire office d’intermédiaire entre deux personnes dont l’une se livre à  la prostitution et l’autre exploite ou rémunère la prostitution d’autrui
  • De tirer profit de la prostitution d’autrui, d’en partager les produits ou de recevoir des subsides d’une personne se livrant habituellement à  la prostitution ».

Par ailleurs (article 225-7), « l’utilisation, pour la diffusion de messages à  destination d’un public non déterminé, d’un réseau de communication électronique » est reconnue comme une circonstance aggravante du proxénétisme.