Chaque matin, je me lève pour changer le monde. Du MLF aux Chiennes de garde – 40 ans de féminisme 

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Florence Montreynaud livre quatre cent pages sans temps mort pour raconter quarante ans de féminisme français et sa propre métamorphose : une lecture revigorante et un beau bouquet d’arguments au service d’une lutte plus actuelle que jamais.

Et liberi et libre : c’est sa devise. Et des enfants – elle en a eu quatre – et des livres – elle en a écrit seize, traduits en six langues -. Le but de sa vie ? Changer le monde, rien de moins. Pourquoi se limiter ? Renée à 22 ans en découvrant l’action des féministes qui, à l’Arc de Triomphe, en 1970, déposent une gerbe à plus inconnue que le soldat… sa femme, Florence Montreynaud livre quatre cent pages sans temps mort pour raconter quarante ans de féminisme français et une métamorphose : jeune femme au bois dormant plongée dans la littérature russe, elle est devenue une militante infatigable de l’égalité entre les femmes et les hommes. La timide s’est déployée en écrivaine et femme publique, le petit Je s’est jeté dans le grand Nous.

Annonce

Féministe debout et en marche, décidée à inventer l’avenir à la force des mots comme à celle des bras, elle a connu le MLF, le Planning, les petits moyens militants, les manifs. Contant ses rencontres avec des femmes d’exception comme Gisèle Halimi et tant d’autres, elle opère un retour sur les grandes dates, mais vécues de l’intérieur : la Mutu en 1972, le procès de Bobigny…

Car le charme du livre tient au fait que cette traversée du féminisme d’hier, d’aujourd’hui et de demain, est colorée par l’histoire personnelle : la construction de soi contre une mère peintre, merveilleuse mais traditionnelle et surtout contre un père qui raillait l’absence de Mozart féminins et traitait sa fille de pute à chaque étape de son apprentissage de la féminité.

Chaque page le prouve. Non seulement le féminisme n’est pas dépassé mais il est porteur d’avenir. Loin du combat hargneux contre les hommes décrit par les malintentionnés, il vise un seul ennemi : l’oppression machiste qui est la base et le modèle de toutes les autres dominations. Parce qu’il lutte pour un monde plus juste et plus doux, il intéresse l’humanité tout entière ; doux, mais pas douçâtre. Car, si le féminisme n’a jamais tué personne contrairement au machisme qui tue tous les jours (pour reprendre la formule de Benoîte Groult, grande dame saluée dans ces pages), il ne lâche jamais. Est-ce en étant gentilles que les femmes auraient obtenu le droit de vote, la contraception et le droit à l’IVG ? Il leur a fallu les arracher. Il n’y a pas de pente naturelle vers l’égalité.

Son enthousiasme indéracinable fait toute l’originalité et la force de l’auteure. Sa campagne pour les législatives de 1978 puis ses multiples combats contre tout ce qui dégrade les femmes lui ont valu un tombereau d’insultes. Mais la fondatrice de La Meute contre les publicités sexistes et des Chiennes de garde (une dénomination mùrement réfléchie et revendiquée) est de ces battantes sur qui les balles machistes ricochent. L’auteure du monumental 20ème siècle des femmes (qui contient bien des Mozart) ne se décourage jamais.

Elle peut donc conter, sans amertume ni esprit de chapelle, les conflits et les souffrances : la prostitution, sujet qui fâche, l’a conduite à une rupture avec Elisabeth Badinter même si elle n’oublie pas leur longue solidarité féministe. Son engagement contre le système prostitueur est de longue date : c’est sur son impulsion que naît en 2011 le réseau international Zéromacho qui rassemble des hommes fiers de ne pas être clients.

Voilà un livre qui permet non seulement de relire passionnément l’histoire féministe des quarante dernières années, de retrouver le moral et le mordant qui manquent à nos temps de crise mais aussi de récolter un beau bouquet d’arguments pour répondre à tous ceux qui caricaturent le féminisme. En prime, on y trouvera des réponses possibles aux malotrus qui peuplent les rues : à celui qui vous dit tu prends combien ?retourner un hautain C’est pas dans tes moyens ! Car l’humour n’est jamais loin, ni dans les combats ni dans les pages.

Chaque matin est un hymne au féminisme, le vrai : actif, enjoué, pacifiste, humaniste. Un vrai roman de notre époque, roboratif et agrémenté d’un fantastique index, avec des entrées aussi diverses que Lucien Neuwirth, Repassage, Eric Zemmour ou Poils

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Claudine Legardinier
Journaliste indépendante, ancienne membre de l’Observatoire de la Parité entre les femmes et les hommes, elle recueille depuis des années des témoignages de personnes prostituées. Elle a publié plusieurs livres, notamment Prostitution, une guerre contre les femmes (Syllepse, 2015) et en collaboration avec le sociologue Saïd Bouamama, Les clients de la prostitution, l’enquête (Presses de la Renaissance, 2006). Autrice de nombreux articles, elle a collaboré au Dictionnaire Critique du Féminisme et au Livre noir de la condition des femmes.