Pornographie féministe, éthique, amateure ? Désintox

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Nous consacrons le dossier du numéro 192 de Prostitution et Société à « la pornographie, de l’exploitation sexuelle filmée ». Nous nous sommes intéressées à  la défense de l’exploitation sexuelle filmée, qui pourrait être acceptable si féministe, ou gratuite… Décryptage.

Il existerait une « pornographie féministe »,

De plus en plus, les observateurs reconnaissent que l’exploitation sexuelle filmée « va trop loin ». Mais pour quand même défendre le modèle, il ne faudrait pas confondre certains films X (l’immense majorité, en fait), violents et dangereux avec la « pornographie féministe », qui elle, serait un retournement du modèle, un idéal à  atteindre… Mais qu’est-ce, au juste, que la « porno féministe » ? Ses adeptes expliquent que, contrairement au « mainstream », le désir des actrices y serait respecté. Elles ne feraient – à  l’écran- que ce qu’elles ont envie de faire. C’est notamment ce qu’affirme Tristan Taormino, une des plus célèbres réalisatrices du genre aux Etats-Unis. Dans son « modèle », les actrices auraient le droit de choisir : leur(s) partenaire(s), les positions sexuelles qu’elles adoptent (et pas en fonction de ce qui « rend bien à  la caméra »), la fréquence, la durée des actes…sauf que…ça n’est pas le cas. Rebecca Whisnant, auteure féministe qui a visionné des scènes tournées dans ces soi-disant « conditions féministes », l’a constaté : rien n’y est différent du mainstream. Pourquoi ? Parce que si l’actrice est censée choisir, elle est aussi là  pour gagner de l’argent. Et pour gagner de l’argent, il faut que les films soient rentables, et il faut donc que ce qu’elles choisissent ressemblent à  ce qui « fait vendre ». Donc, si leur choix est, pendant le tournage, de ne pas effectuer d’actes sexuels, parce que le désir n’est pas au rendez-vous, elles ne seront pas payées… Taormino elle-même, explique Rebecca Whisnant, reconnaît que la volonté de donner le pouvoir aux actrices est illusoire, aussi parce que les producteurs qui donnent de l’argent pour faire les films…en veulent pour leur argent !

‘‘But What About Feminist Porn? »: Examining the Work of Tristan Taormino , by Rebecca Whisnant

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La « porno amateur », « gratuite »

On nous objecte de plus en plus souvent : dans la porno amateur, il ne s’agit pas d’actes prostitutionnels, puisque la personne n’est pas payée pour les effectuer. Pas payée ? C’est vrai, parfois. Mais néanmoins, l’acte sexuel est effectué à  des fins commerciales. Si ce n’est pas forcément l’actrice qui reçoit l’argent, ce sont tous les autres acteurs de la chaîne commerciale. Et de toutes façons, le « produit » -le film de l’acte sexuel dit amateur- n’existe que parce qu’il y a des personnes intéressées à  en faire commerce. Ce n’est pas parce que l’acte serait gratuit que ce n’est pas le marché qui l’impose. On sait bien à  quel point le capitalisme utilise aujourd’hui la gratuité comme outil de vente. C’est la même chose dans le porno. La réalité, est que personne ne ferait du porno « pour la beauté de l’art » ou pour la représentation. Sa seule raison d’être est l’argent.

Liberticides, nous voudrions restreindre la liberté de représenter la sexualité ?

Depuis quand a-t-on besoin de reproduire les actes pour les représenter ? Doit-on tuer une personne pour pouvoir représenter les effets d’un meurtre ? Faut-il boire de l’alcool pour représenter de l’alcool ? Représenter n’est pas reproduire !

Retrouvez l’ensemble de notre dossier dans notre numéro 192