Le site internet « Rich Meet Beautiful » a logiquement provoqué la polémique avec des publicités mobiles dans Paris, qualifiées notamment par la mairie de Paris d’incitation à la prostitution. Il a utilisé une remorque circulant à proximité des universités parisiennes avec une publicité illégale, pour s’offrir un gros « coup de pub ». Le véhicule a été saisi, et le parquet de Paris a ouvert une enquête, notamment pour proxénétisme aggravé.
Ce site se définit comme un site de rencontres entre « Sugar Babies », femmes « jeunes et jolies » et « Sugar Daddies » (ou mummies), principalement des hommes plus âgés, riches, avec qui ils auraient un « échange de services ».
Le Mouvement du Nid, qui rencontre chaque année 5000 personnes en situation de prostitution, a depuis longtemps connaissance de ce type de relations, et les témoignages sont sans appel : « des relations sexuelles sont quasiment toujours demandées et obtenues en échange d’argent dans le cadre de ces rencontres », explique Claire Quidet, porte-parole du Mouvement. « Il s’agit presque toujours de prostitution qui ne dit pas son nom, mais qui a les mêmes effets délétères sur les personnes qui la vivent», ajoute-t-elle.
Or en France, le code pénal interdit l’achat d’un acte sexuel. « Solliciter, accepter ou obtenir relations de nature sexuelle de la part d’une personne se livrant à la prostitution en échange de rémunération, de promesse de rémunération, de la fourniture d’un avantage en nature ou de la promesse de cet avantage » contrevient à la loi. Les hommes qui le font sont donc pénalisables.
En France, le proxénétisme est interdit
S’il s’avérait que le site RichMeetBeautiful favorisait ce type de relations, il nous semble qu’il y aurait en outre incitation à la prostitution, ce qui relèverait du proxénétisme, interdit par la loi.
En effet, le Mouvement du Nid rappelle qu’en France, le proxénétisme est interdit, et qu’il a alerté en avril dernier le gouvernement sur la nécessité de lutter contre le proxénétisme en ligne par une lettre ouverte. Comme nous l’expliquions alors, mettre en relation des clients et personnes en situation de prostitution s’apparente à l’organisation de la prostitution, et relève du proxénétisme.
Le code pénal (article 225-6) qualifie en effet de proxénétisme « le fait, par quiconque, de quelque manière que ce soit : • De faire office d’intermédiaire entre deux personnes dont l’une se livre à la prostitution et l’autre exploite ou rémunère la prostitution d’autrui • De tirer profit de la prostitution d’autrui, d’en partager les produits ou de recevoir des subsides d’une personne se livrant habituellement à la prostitution »
Par ailleurs (article 225-7), « l’utilisation, pour la diffusion de messages à destination d’un public non déterminé, d’un réseau de communication électronique » est reconnue comme une circonstance aggravante du proxénétisme.
Or aujourd’hui, de nombreux sites Internet font non seulement office d’intermédiaires entre les personnes prostituées et les acheteurs de sexe, mais en tirent en plus des profits considérables.
Quelle réponse de la société face à la précarité des jeunes femmes ?
Le Mouvement du Nid se félicite donc que la mairie de Paris ait porté l’affaire devant les tribunaux, et que le parquet de Paris se soit saisi du dossier, pour que la justice puisse déterminer si oui ou non ce site relève de cette définition du proxénétisme.
Quoi qu’il en soit, il nous semble inconcevable qu’en 2017, la réponse de notre société à la précarité croissante des jeunes femmes passe par ce type de site et que de telles relations soient encouragées. En effet, les femmes devraient, encore et toujours, considérer que leur meilleur atout dans la vie, est leur apparence physique plutôt que leurs compétences ? Selon nous, cela ne peut pas être un choix de société acceptable à un moment de l’histoire de notre pays où la parole des femmes victimes de violences se libère, où l’égalité entre les femmes et les hommes est grande cause nationale et une de nos valeurs fondamentales.