Faut-il vraiment s’étonner de voir aujourd’hui sous les verrous le si bronzé Jà¼rgen Rudloff, patron allemand de la chaine de bordels Paradise et pilier des plateaux de télé ? Complicité de traite des êtres humains, prostitution forcée, fraude, tout y est. L’homme a écopé le 27 février 2019 de cinq ans de prison. Après cette énième affaire, nos voisins allemands vont-ils persister à donner à des crapules le droit de faire fortune en exploitant sexuellement des femmes à échelle industrielle ?
L’homme roulait en Porsche, se pavanait dans la presse, cultivant l’image de l’entrepreneur modèle. Conforté dans son rôle d’investisseur de pointe par un Etat qui a voté en 2002 la légalisation d’une partie du proxénétisme, il a eu tout loisir d’empocher les dividendes dans ses bordels de Stuttgart, Francfort et Sarrebrà¼ck : 79 € d’entrée avec buffet à volonté et accès aux chambres, pour une moyenne de 300 « clients » par jour à Stuttgart et un chiffre d’affaires déclaré de 6 millions d’euros. En Allemagne, où la prostitution est un « service » reconnu permettant à des patrons d’inviter leurs employés au bordel dans le cadre de salons professionnels, l’homme fait partie des peoples.
Aujourd’hui, son image est écornée : 5 ans de prison ferme, 1,3 million d’euros confisqués. Son acolyte, Michaël Beretin, « responsable marketing » est également condamné à 3 ans et 3 mois fermes. Au terme de 4 ans de procédure, il apparaît que le « commerce » de Monsieur Rudloff cachait des méthodes de brigand. Des groupes criminels comme les Hells Angels étaient impliqués dans le recrutement et la « bonne marche » des établissements, usant de la violence au point de faire tatouer le nom de leur proxénète sur le corps des jeunes femmes.
Pour sa défense, l’homme, modèle d’innocence, a indiqué qu’il faisait signer à chacune un document dans lequel elle déclarait ne pas travailler sous la contrainte. Et qu’il ne touchait rien sur la somme que les femmes demandent aux « clients », une affaire privée dont il ne se serait mêlé pour rien au monde.
Une certaine conception du paradis
Le bordel exemplaire défendu par Monsieur Rudloff est un établissement où 60 à 90 femmes, nues et juchées sur des talons aiguilles, sont sexuellement corvéables. Un « oasis de bien-être pour les hommes »[[« Wellness Oasen fà¼r Mà¤nner »]] où elles doivent elles-mêmes s’acquitter des 79 € d’entrée, sans compter les 25 € qu’elles versent comme impôts à l’établissement, les 23 € par nuit pour celles qui dorment dans les dortoirs, et tous les « extras » à prix d’or dont les bordels ont le secret pour endetter les femmes qu’ils exploitent et les tenir d’autant mieux.
Cette affaire est loin d’être la première du genre. Deux tenanciers de l’Artemis de Berlin dorment également en prison depuis 2016. Hermann Mà¼ller, patron de la chaine des Pascha à Munich et à Cologne, a de son côté été condamné à 3 ans et 9 mois pour évasion fiscale en 2017.
Face à cette épidémie, les autorités allemandes vont-elles réagir ? Ou continuer de croire que ces individus ont pour objectif le respect des droits humains en général et ceux des femmes en particulier ?
Ainsi, un capitalisme sans états d’âme profite de la situation désastreuse de milliers de femmes d’Europe de l’Est notamment pour les exploiter froidement en prétendant protéger leurs droits. Cette logique machiste et parfaitement inhumaine ne peut, on l’espère, qu’être remise en cause dans un pays désormais connu comme le « bordel de l’Europe ».
A l’heure où les abolitionnistes s’organisent Outre-Rhin, cette énième affaire devrait contribuer à mettre les points sur les i. Une fois de plus, le réglementarisme à l’allemande fait la preuve du scandale qu’il représente aujourd’hui en Europe.