Le projet est dans l’air depuis 2011. Prévue en 2013, puis en 2015, puis en 2016, voilà l’idée d’ouvrir un « Eros center » relancée à Seraing, en Wallonie. Cette initiative publique, financée avec l’argent du contribuable, verra-t-elle le jour ? Ou finira-t-elle enterrée sur le modèle du projet de « bordel associatif » Isatis[[À lire sur ce site : art401.]], à Liège ?
En mars dernier, la commune de Seraing a lancé un appel d’offres d’un montant de 7 millions d’euros pour la construction de ce bâtiment assez moderne, de forme ovale, avec des salons qui permettent aux clients de faire un choix
selon les termes du bourgmestre Alain Mathot (PS).
Devant la concentration croissante de la prostitution dans un seul quartier, la rue Marnix, la Ville de Seraing a décidé d’encadrer l’activité
prostitutionnelle en confiant la gestion de cette maison close à une asbl, association composée d’élus de diverses tendances. Comme le souligne avec ironie le mensuel féministeAxelle, houlà , rien à voir avec du proxénétisme puisque l’affaire sera gérée par une asbl. À but non lucratif, donc. Ou juste un tantinet lucratif[[Axelle, « Seraing : corps des femmes et deniers publics ».]]
. Car pour commencer, l’administratrice de l’asbl montée pour gérer le projet a reçu, selon la presse belge, 48.000 euros par an pour environ dix heures de travail hebdomadaire[[Le Soir, « Au sein du futur Eros center sérésien, une nouvelle affaire de mandat étonnamment rémunéré », 3/07/2017.]].
L’établissement, financé par la commune, sera (serait ?) de 2000 m2, sur plusieurs niveaux, avec 34 chambres, un bureau médical, un de police, des locaux de détente, un jardin intérieur et un parking de 4.000 m2 pour les « clients ». Côté hypocrisie, un système de voiles empêchera de voir l’entrée depuis la rue.
A raison d’une centaine de femmes soumises aux 3 x 8 pour répondre aux urgences sexuelles de la clientèle, l’établissement devrait être d’une rentabilité exceptionnelle. L’idée, évidemment défendue au nom de la sécurité des femmes prostituées, semble pour le moment réunir de nombreux adeptes. En 2013, les architectes s’étaient eux aussi bousculés pour proposer des projets, parmi lesquels le français Riciotti.
Les initiatives originales ne manquent décidément pas en Wallonie. Un autre projet, lancé en 2015 et apparemment tombé aux oubliettes, était d’ouvrir des Eros centers sur les parkings autoroutiers sur le modèle des stations-service. Selon la presse, l’administration avait même mandaté officieusement pour l’occasion un « expert », Dominique Alderweireld, dit Dodo la Saumure, proxénète notoire et bon client des tribunaux comme l’a montré l’affaire du Carlton[[Sudinfo.be, « Des Eros centers sur les aires d’autoroute en Wallonie », 1/04/2015.]].
Face à ces projets désarmants, les oppositions s’organisent. En 2015, le Conseil des femmes francophones de Belgique avait déjà menacé la Ville de Seraing d’une action au Conseil d’État si l’Eros center était construit. De son côté, la revueAxelle relève le fait que fin mars, le conseil communal de Seraing a voté une charte en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes. On parie que les opposant.es au projet ne vont pas manquer de faire valoir à quel point l’ouverture d’un tel établissement est une étape décisive pour atteindre cet idéal!