Le récent démantèlement de réseau dans un pavillon de Savigny sur Orge, en Essonne, apparaît comme exemplaire de ce que la loi du 13 avril 2016 permet. Au lieu d’abandonner les victimes à leur sort, comme c’était le cas traditionnellement, la police commence à anticiper leurs besoins et à faire appel à l’accompagnement associatif.
Le 20 mai 2019, la police a lancé un coup de filet dans ce pavillon de banlieue faussement tranquille et interpellé six proxénètes. Six femmes sans papiers se trouvaient sur place, de nationalité espagnole, colombienne, brésilienne, portugaise, dominicaine et paraguayenne. Après leur audition, elles ont été remises en liberté.
Fait nouveau, et remarquable, le service de police judiciaire avait pris soin, en amont, de contacter la délégation du Mouvement du Nid pour lui permettre d’anticiper les actions à mettre en œuvre pour les femmes victimes. Il était convenu que deux de ses représentantes se trouveraient dans les locaux lors des interpellations pour se tenir à la disposition de celles qui le souhaiteraient.
Les officiers de la police judiciaire (PJ) ont accueilli ces femmes comme des victimes et non comme des coupables ou des délinquantes. Nous saluons leur grand respect des personnes
, souligne Evelyne, responsable de la délégation.
Accompagner les victimes dans l’urgence
Pour les bénévoles de l’association, il a donc fallu agir vite, se rendre disponible de 15h30 à 23h et déterminer les mesures d’urgence : s’arranger pour que l’une, dont le mari ignore les activités, puisse rentrer à son domicile, orienter une autre, enceinte d’un « client » qui la frappe, vers un service de gynécologie, renvoyer la troisième vers les Hauts-de-Seine, département dont elle relève. Par chance, une personne de la délégation parle couramment l’espagnol et la PJ avait également prévu un interprète.
Que la PJ ait pensé à nous associer est pour nous un succès
, explique la délégation, mais en prenant soin évidemment de bien situer la séparation entre elle et nous, association d’accueil. Nous avons disposé d’un bureau à part où les femmes ont pu venir nous voir après leur audition. Aucun risque d’être confondus avec la police !
Près d’un million d’euros d’avoir devraient être saisis
Trois femmes sur six ont finalement demandé à entrer dans le parcours de sortie de prostitution prévu par la loi, les autres prévoyant de se rendre en Espagne ou au Portugal. Mais, sans papiers, elles couraient le risque de recevoir du Préfet une Obligation de quitter le territoire français (OQTF). Par chance, en Essonne, un jugement du tribunal administratif exige que les victimes de traite passent d’abord devant la commission départementale
, se félicite la délégation.
Quant aux proxénètes, deux hommes de 80 ans, une femme et deux rabatteurs, ils ont été déférés au Parquet. 250.000 euros en liquide ont été trouvés lors des perquisitions et près d’un million d’euros devraient au total être saisis, ainsi qu’une luxueuse villa avec piscine et des véhicules haut de gamme.
Pour en savoir plus sur les derniers démantèlements de réseau qui se sont multipliés ces dernières semaines
Vous êtes victime de prostitution ? Vous connaissez une victime ou avez repéré une situation anormale ? Vous pouvez contacter le Mouvement du Nid par mail ou par téléphone. Toutes les coordonnées sont à retrouver ici