Euro 2012 en Ukraine : une bonne affaire pour la prostitution

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Au moins, le sujet n’est plus ignoré. A l’approche de chaque compétition internationale de football, des ONG parviennent désormais à attirer l’attention sur les conséquences en matière de prostitution. Après l’Allemagne en 2006 puis l’Afrique du Sud en 2010, c’est donc au tour de l’Ukraine et de la Pologne d’accueillir l’Euro 2012, du 9 juin au 1er juillet.

Un million de supporters sont attendus en Ukraine, pays connus pour ses filles de l’Est blondes et bon marché, et la rumeur parle d’augmentation des tarifs prostitutionnels et de pots de vin en prévision de cette manifestation prometteuse. Alors que les activistes de Femen, dont les seins nus ont fait la notoriété, dénonçent l’augmentation probable du tourisme sexuel aux cris de « Fuck Euro 2012 » et interpellent l’UEFA à qui elles reprochent sa passivité sur le sujet, le responsable ukrainien de la lutte contre la traite des êtres humains avoue à l’agence Reuters que la situation criminelle semble empirer à l’approche de la compétition mais que vouloir réduire la prostitution revient à se battre contre des moulins à vent.

Prostitution mais aussi VIH

Dans un pays où la prostitution est illégale mais l’industrie du sexe de plus en plus florissante, l’alliance VIH/Sida avance des chiffres conséquents : entre 52.000 à 83.000 prostituées dans le pays, dont 11.000 dans la capitale, Kiev. Une réalité liée à une situation économique difficile (le salaire moyen est d’environ 200 euros mensuels) à laquelle s’ajoute le drame du sida dans le pays d’Europe le plus touché par le virus. Selon Onu-Sida, 24 % des prostituées de Kiev seraient séropositives et le port du préservatif semble très aléatoire. Bref, c’est l’impuissance qui prévaut. La Coordination Française du Lobby Européen des Femmes (CLEF), qui publie un communiqué, engage le gouvernement ukrainien, pionnier en matière de lutte contre la traite des êtres humains, à lutter avec détermination contre les mafias et l’UEFA à utiliser tous ses moyens de communication pour appeler les supporteurs à avoir une attitude responsable lors de leur séjour en Ukraine. On doute fort qu’elle soit entendue…

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Claudine Legardinier
Journaliste indépendante, ancienne membre de l’Observatoire de la Parité entre les femmes et les hommes, elle recueille depuis des années des témoignages de personnes prostituées. Elle a publié plusieurs livres, notamment Prostitution, une guerre contre les femmes (Syllepse, 2015) et en collaboration avec le sociologue Saïd Bouamama, Les clients de la prostitution, l’enquête (Presses de la Renaissance, 2006). Autrice de nombreux articles, elle a collaboré au Dictionnaire Critique du Féminisme et au Livre noir de la condition des femmes.