« Ensemble pour une Europe libérée de la prostitution », c’est le nom d’une campagne lancée par le Lobby Européen des Femmes en juin 2011, destinée à sensibiliser les citoyenNEs à la question du système prostitueur et à remettre la question à l’ordre du jour politique.
Lors du lancement de la campagne en France par la CLEF, Pierrette Pape, chargée de politiques et coordinatrice de projets au LEF, a rappelé les nombreux poncifs et clichés qui accompagnent et justifient notre tolérance pour le système prostitueur, et que les médias ont tendance à véhiculer au détriment de la réalité de la prostitution.Pour 25% des hommes, le concept de « viol » pour une femme prostituée est « ridicule ». Pourtant, 62% des personnes prostituées interrogées rapportent avoir été violées. L’échange d’argent tente de faire oublier que le système prostitueur est un lieu de domination et d’oppression, qui perpétue – voire légitime – l’inégalité structurelle entre les femmes et les hommes.Le clip « Changeons de perspective » est l’un des nouveaux outils de campagne du LEF, qui mise sur l’interpellation des hommes afin de provoquer le débat et faire évoluer les mentalités. Frédérique Pollet Rouyer, qui a coréalisé le clip avec Patric Jean, a expliqué la démarche choisie :
Nous voulions bousculer l’évidence en renversant les rôles, en amenant les hommes à devoir se mettre à la place d’une femme prostituée. La prostitution est une question de domination, peu importe l’acte sexuel en jeu. Au regard de la tolérance généralisée envers la prostitution et l’absence de réflexion d’une partie des hommes sur leur rôle dans ce système, on a voulu apporter une autre manière de provoquer le débat et faire réfléchir.Danielle Bousquet, alors députée PS, vice-présidente de la Délégation de l’Assemblée nationale aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes et présidente de la Mission d’information sur la prostitution en France qui a abouti à un rapport parlementaire contenant 30 propositions concrètes pour une loi abolissant le système prostitueur en France s’est réjouie de cette campagne qui permet de porter la voix abolitionniste au niveau européen, face aux lobbys pro-prostitution. C’est dans l’ensemble de la société que le débat doit être instauré, pour contrer le fait acquis, a-t-elle dit. Les droits des femmes, l’égalité et la liberté ne doivent pas et ne peuvent pas conduire à la prostitution. Danielle Bousquet s’est réjouie du nouveau clip du LEF :
Il va aussi interpeller les femmes ! Beaucoup d’entre elles estiment que la prostitution est normale et s’accommodent de poncifs tels que celui des ‘femmes de mauvaise vie’. L’inversion dans le clip montre à quel point c’est insupportable, et cela ne manquera pas de bousculer autant de femmes que d’hommes.Lors de la discussion, des participantEs ont rappelé la réalité des violences dans la prostitution, l’importance de l’éducation à la sexualité et à l’égalité, la nécessité de se réapproprier les termes du débat, comme l’expression
pro-sexe. Maudy Piot, de l’association Femmes pour le dire, femmes pour agir, a rappelé le refus de son association de voir des « aidants sexuels » :
Le recours à des « aidants sexuels » formés et rémunérés pose fondamentalement la question de la prostitution comme réponse à de soi-disant « besoins ». On sait que la demande est essentiellement masculine et que la réponse serait essentiellement féminine. Mais même s’il s’agit d’aidants masculins, le problème demeure : celui de la marchandisation du corps, de la femme ou de l’homme. Il ne peut justifier un « ajustement » des lois sur le proxénétisme, alors que la France est engagée dans la lutte contre les violences faites aux femmes et le trafic des êtres humains.
Le Mouvement du Nid est fier d’être partenaire d’une campagne qui vise à sensibiliser et à provoquer le changement politique et social. Nous sommes convaincus de la vertu pédagogique d’une loi, qui est complémentaire à la mise en place d’alternatives réelles et crédibles pour les personnes prostituées.