Sous la coupe d’un proxénète

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La prostitution constitue et a toujours constitué un thème privilégié de la littérature.
Aussi, nous a-t-il paru important de mettre en lumière la façon dont elle est dépeinte par les romanciers.
Dans cette rubrique, les citations littéraires sont mises en parallèle avec les témoignages actuels des personnes prostituées, comme des clients.
Une mise en perspective riche d’enseignements!

Ils monopolisent à  leur profit la camelote de l’innocence.

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Le désespéré, Léon Bloy, ed. La part commune, 2004, p.89.

Il l’avait trouvée, une nuit, dans la rue, désolée et sans asile. Son histoire, infiniment vulgaire, était la navrante histoire de cent mille autres. Séduite par un drôle sans visage que d’inscrutables espaces avaient presque aussitôt englouti, chassée de sa pudibonde famille et ballottée, comme une épave, elle était tombée sous la domination absolue d’un de ces sinistres voyous naufrageurs, moitié souteneurs et moitié mouchards, qui monopolisent à  leur profit la camelote de l’innocence. 

Dans ce roman français écrit par Léon Bloy (1846 1917), le héros Marchenoir, écrivain à  la plume redoutable, s’éprend de Véronique, dite la Ventouse, une personne prostituée.

Un homme qui me promet la lune, l’amour! 

J’avais 22 ans lorsque j’ai rencontré mon proxénète et la suite, vous l’imaginez! En amont, une enfance, une adolescence douloureuse et, en aval, un homme qui me promet la lune, l’amour, etc.

Témoignage de Christine,Prostitution et société n°124.

Un proxénète, au début on l’aime. Puis vient la peur. Et la haine.

 L’alcool, on ne peut plus s’en passer parce qu’il fait oublier la peur. Il aide à  affronter. On vit dans la peur dans la prostitution. Peur du proxénète : de ne pas faire assez d’argent! Un proxénète, au début on l’aime. Puis vient la peur. Et la haine. On joue le jeu avec le proxénète, on joue le jeu avec les clients et on se saoùle pour supporter tout ça. C’est invivable.

Témoignage de Monique,Prostitution et société n°100.

Quand j’ai voulu arrêter, il a commencé à  me menacer de mort. Il venait me harceler la nuit.

Dans ces bars, on rencontre des cinglés et aussi des hommes gentils. J’en ai rencontré un qui m’a joué du violon (!) En fait, c’était un mac (!). Il m’a proposé de me prostituer à  son domicile plutôt que dans le bar et il m’a fait un site Internet. Il prenait une commission et il m’injuriait (!).Voilà  qui était l’homme qui prétendait qu’il allait me sauver.
La situation est allée crescendo. Quand j’ai voulu arrêter, il a commencé à  me menacer de mort. Il venait me harceler la nuit. Il avait aussi persuadé d’autres prostituées de me harceler. Mon téléphone sonnait 24h sur 24. D’ailleurs, aujourd’hui encore, je sursaute quand je l’entends sonner.

Témoignage d’Ariane,Prostitution et société, n°185.