Client prostitueur, fin de règne ? (2e partie)

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prostitueurAprès une première partie consacrée au portrait du « client » prostitueur, cette seconde partie de notre dossier spécial examine la façon dont les législations envisagent le rôle de celui-ci dans le système : délinquant ou roi ? 

Depuis le 13 avril 2016, l’achat d’acte sexuel est interdit en France. Le « client » prostitueur contrevient donc à la loi, il devient même délinquant en cas de récidive. C’est une révolution législative qui vient répondre à une réalité trop longtemps ignorée : celui qui achète un acte sexuel (on restera au masculin car la proportion d’hommes « clients » approche des 100 %), le prostitueur, impose en réalité cet acte en usant de la contrainte financière.

Malheureusement, le déni de cette réalité perdure, favorisé par des forces politiques puissantes. Dans les pays qui ont légalisé la prostitution, s’est mise en place la politique du « client-roi » ; le déni y est accentué par l’action de lobbies pro-prostitution (pro « travail du sexe »), qui ont tout intérêt à effacer le prostitueur du discours sur le système dont il bénéficie.

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Même déni pour le « client de la pornographie ». Combien d’années aura-t-il fallu avant qu’on commence à dénoncer que « consommer du porno », c’était consommer et se masturber en regardant des violences sexuelles, des incitations à la haine sexiste, raciste, lesbophobe, à la pédocriminalité à grande échelle qui, parce qu’elles sont filmées, sont ignorées ?

Après avoir rendu visible le « client » et dévoilé son vrai visage dans la première partie de ce dossier, nous examinons maintenant comment la loi et la société peuvent changer la donne, selon qu’elles incluent ou non le prostitueur dans leur réflexion.

Retrouvez-ci dessous le sommaire de ce dossier et ci joint le PDF de la version intégrale !

PS212-Dossier

Sur le prostitueur : Deux modèles aux antipodes 

Une fois le profil des « clients » connu, on ne peut plus ignorer l’importance de leur rôle, comme le dit la crimino- logue québécoise Maria Mourani. Ni le fait que tant que les hommes n’auront pas une vision plus égalitaire des femmes, les relations femmes-hommes et la liberté sexuelle resteront des mirages.

L’abolitionnisme : replacer le « client » prostitueur au centre du système

« Attendu qu’il est injuste de punir le sexe qui est victime d’un vice tout en laissant impuni le sexe qui est la cause principale, à la fois du vice et de ses conséquences redoutées, nous considérons que les peines encourues par les femmes soumises à ces lois sont indignes ». Josephine Butler

Les féministes abolitionnistes ont révélé l’existence du « client » et veulent qu’il réponde de ses actes. Elles ont été les premières à le nommer : un homme qui exerce une domination.

Dépénalisation : le règne du « client » roi ! 

Dans les pays où la « dépénalisation » ou légalisation est la règle, qui est le principal bénéficiaire de la loi ? Le « client » !

«Sous le régime de dépénalisation ou légalisation totale, les acheteurs et proxénètes sont totalement légitimés, tout comme nous. En théorie, cela doit permettre une protection adéquate pour les femmes, mais ce n’est pas le cas en réalité. La demande augmente, la concurrence aussi, et des amendes plus élevées peuvent toucher des femmes concernées. Un des béné- fices de ce système est que les femmes en prostitution sont en effet moins souvent arrêtées, mais pas moins sujettes à la stigmatisa- tion, à la violence, aux traumatismes et à la mort prématurée » Simone Andrea, survivante de la prostitution

La fin de règne se fait attendre 

De nouvelles résistances protègent encore trop souvent le droit du « client » prostitueur. Au premier rang desquelles, la propagande des partisans de l’idéologie du « travail du sexe », pour qui il est vital que le « client » reste invisible.

Les hommes doivent faire face aux conséquences indiscutables « découlant de l’exercice de leur rôle traditionnel et machiste, et interroger individuellement et collecti- vement le modèle de sexualité toxique et violente qu’ils perpétuent en achetant du sexe ou en cautionnant ceux qui le font. Ils ne peuvent plus continuer à se taire, et doivent s’impliquer dans la construction d’un modèle de relations justes et égalitaires et reconnaître leur responsabilité dans le maintien de l’institution patriarcale, capitaliste, raciste, classiste et violente qu’est la prostitution » Peter Szil, sociologue

Illustrations  ©Alice Sandrin

A voir également : le replay de l’événement organisé par CAP international « Sex Work is not Work » dans le cadre de la CSW