« La menace du stigmate de putain agit comme un fouet qui maintient l’humanité femelle dans un état de pure subordination. Tant que durera la brùlure de ce fouet, la libération des femmes sera en échec« .
Pour Gail Pheterson, psychologue et psychothérapeute, co-fondatrice du Comité International pour les Droits des Prostituées et organisatrice du « Congrès mondial des putains » au Parlement européen en 1986, seul le stigmate qui pèse sur les prostituées est à dénoncer : « Otez de l’échange économico-sexuel le stigmate de putain, et la «prostitution» s’évapore« .
Selon elle, en négociant le temps de la passe, les actes et le prix, la femme « entre en tant que sujet dans une relation avec les hommes où existe davantage de réciprocité que dans la situation conjugale de service non reconnu et illimité« . Épouse ou prostituée, même combat. On retrouve là une analyse qui eut un temps le privilège de la « modernité » dans les années 70. Aujourd’hui, elle nous semble féodale.
Chez Pheterson, pas un mot sur les pratiques sexuelles imposées aux prostituées contre leur désir, sur les violences subies ; jamais l’ombre d’une remise en cause de l’irresponsabilité des clients et de leur « droit » séculaire à consommer des corps, bien au contraire ; mieux (ou pire), des allusions à « la bonne conduite des maquereaux« . Et pour finir, un hymne à la conquête d’autonomie que constitue pour les femmes contraintes à l’émigration en Occident le fait d’être au service sexuel des dominants !
Pour nous, pas question de suivre. Oui, l’utilisation systématique du stigmate de putain contre les femmes est une réalité et un vecteur de la domination. Mais il ne s’agit pas de se l’approprier de gré ou de force, mais bien de le rejeter entièrement et absolument. De lutter pour l’accession des femmes au statut de sujet plein et entier, et non de se résigner à l’obligation prétendument éternelle qui leur serait faite de se livrer, dans le mariage ou dans la prostitution, à « l’échange économico-sexuel« .