La prostitution en débat à ATTAC

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Pour ATTAC, les politiques de libéralisation de la prostitution sont indissociable des grandes manœuvres mondiales pour inscrire (…) la soumission au marché de tous les aspects de la vie humaine .

Nous avons eu l’occasion de déplorer le peu d’entrain des militants altermondialistes dans la dénonciation de l’une des pires conséquences de la mondialisation libérale : l’explosion de la prostitution et de la traite, dont les femmes sont les premières victimes sur l’ensemble de la planète.

Large rassemblement d’associations, d’organisations syndicales, de titres de presse, de personnalités et de citoyen-ne-s, Attac s’est constitué en 1998 contre la « dictature des marchés ». Ce mouvement d’éducation populaire a organisé la résistance contre les logiques ultralibérales et la mondialisation financière, cause, selon lui, d’une aggravation de la précarité économique et des inégalités sociales. On pouvait ainsi lire dans Tout sur Attac[[Collection Les Petits libres, Mille et une nuits, 2000.] sa volonté de contester la domination de la finance dans un monde où tout devient progressivement marchandise, où tout se vend et s’achète, et donc de contester l’organisation des rapports économiques, humains, sociaux, politiques et de transformer le monde par le biais de mobilisations démocratiques et citoyennes.

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À cette aune, la remise en cause du système prostitutionnel relancé par la machine libérale était inévitable. Pourtant, en 2004, nous rendions compte dans nos pages des difficultés rencontrées par la commission Genre et Mondialisation pour faire avancer le dossier[[ 148.]], des déchirements internes et autres accusations de puritanisme…

La Commission a tenu bon. De plus, en s’intéressant aux flux financiers et au blanchiment d’argent mais aussi aux problématiques spécifiques aux femmes[[Quand les femmes se heurtent à la mondialisation, Mille et une Nuits, 2003.]], les premières touchées par la précarité et la pauvreté, Attac ne pouvait pas rester indéfiniment à l’écart de la question. En 2007, la commission Genre est donc revenue à la charge. Elle a publié un document intitulé Mondialisation de la prostitution dans le but de lancer le débat auprès du Conseil scientifique de l’organisation.

Le document pointe les politiques de libéralisation de la prostitution, indissociable des grandes manœuvres mondiales pour inscrire (…) la soumission au marché de tous les aspects de la vie humaine et dénonce la prostitution comme une des pires manifestations de la violence sociale contre les femmes et de la domination masculine, à la fois physique et symbolique. Le texte aborde d’emblée la question du « libre choix » destinée à occulter la réalité des rapports sociaux et des formes de domination.

Devant l’intérêt soulevé par le texte, le conseil scientifique d’Attac a pris la décision de publier un petit livre d’éducation populaire sur ce thème. Rédigé par des abolitionnistes, il est paru fin 2008 : Mondialisation de la prostitution, atteinte globale à  la dignité humaine.

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Claudine Legardinier
Journaliste indépendante, ancienne membre de l’Observatoire de la Parité entre les femmes et les hommes, elle recueille depuis des années des témoignages de personnes prostituées. Elle a publié plusieurs livres, notamment Prostitution, une guerre contre les femmes (Syllepse, 2015) et en collaboration avec le sociologue Saïd Bouamama, Les clients de la prostitution, l’enquête (Presses de la Renaissance, 2006). Autrice de nombreux articles, elle a collaboré au Dictionnaire Critique du Féminisme et au Livre noir de la condition des femmes.