« Rosen en marche pour l’abolition »

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En 2014, Rosen Hicher, survivante de la prostitution, se lançait dans une marche de 743 km de Saintes à  Paris pour dénoncer le blocage de la loi de renforcement de la lutte contre le système prostitutionnel par les sénateurs, après son vote fin 2013 à  l’Assemblée nationale. Pendant plusieurs semaines, la réalisatrice Catherine Tissier l’a suivie. A lors que la loi pour laquelle Rosen Hicher s’est battue a été votée le 6 avril 2016, elle livre aujourd’hui ce beau portrait d’une femme exceptionnelle.

Quand Rosen a quitté Saintes, le 3 septembre 2014, rien n’était encore joué. La loi semblait enterrée par le Sénat qui tardait à  la mettre à  son ordre du jour. Le gouvernement ne semblait plus avancer. Les associations cherchaient un deuxième souffle de mobilisation. Ce souffle est venu de la décision soudaine de Rosen Hicher, survivante de la prostitution que nous connaissons bien au Mouvement du Nid, de prendre la route pour essayer d’attirer l’attention des médias sur l’urgence. L’urgence d’inverser la charge pénale qui reposait encore sur les personnes prostituées, victimes du système, pour la faire peser, sur les proxénètes bien sùr, mais aussi sur « les clients », ces hommes qui s’accordent le droit d’acheter une relation sexuelle. L’urgence enfin de protéger les victimes.

Rosen est partie de Saintes, car c’est là  qu’elle a arrêté la prostitution. Direction Paris, rue du Colisée, là  où, 22 ans plus tôt, elle l’avait commencée. Sur cette route, Rosen a marché, mais aussi réfléchi, et fait réfléchir les personnes qu’elle a rencontrées. Celles qui l’ont accompagnée, pour un petit bout de route, celles qui ont, peu à  peu, commencé à  l’accueillir dans les mairies. C’est ce cheminement vers la compréhension d’un parcours de vie, mais aussi des conséquences humaines du système prostitueur, que Catherine Tissier nous donne à  voir dans son documentaire.

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Elle ne connaissait pas Rosen avant de partir. Elle a découvert via Facebook son projet, et décidé immédiatement de la suivre, caméra à  l’épaule. C’est cette rencontre que le film nous donne à  voir, une rencontre avec une femme qui se livre, comme toujours, avec une grande sincérité. Le film n’est pas militant. C’est avant tout le portrait d’une humaine. Un beau portrait d’une femme en mouvement, à  la force et à  la détermination peu communes. Mais un portrait qui nous montre aussi Rosen dans toute sa complexité, avec son entourage, ses colères, et son courage. La scène où elle répond à  un homme sur la place de la mairie d’Orléans, qui voudrait la réouverture des maisons closes est à  cet égard édifiante, et à  l’image de la route que Rosen a suivi, et que la réalisatrice nous fait suivre avec elle.

Détermination envers et contre tous les obstacles, parce que Rosen s’en est sortie, et qu’elle veut que les autres puissent à  leur tour s’en sortir. Elle s’en est sortie, mais elle a aussi trouvé sur cette route quelque chose de plus profond, un lien avec la nature, un enracinement dans son être qui a perduré bien au-delà  du 12 octobre, jour où elle est arrivée à  Paris, attendue par des centaines de militant.e.s et par d’autres survivantes, venues lui apporter leur soutien.