8 mars : Des abolitionnistes et survivantes une nouvelle fois violemment agressées en manif

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Le 8 mars 2022, lors d’une manifestation de lutte pour les droits des femmes, des militantes féministes abolitionnistes et survivantes de la prostitution ont été agressées dans plusieurs villes de France. Un schéma d’intimidation qui se répète d’année en année.

A Paris, les faits se sont produits sur la place de la République. Alors que le cortège de l’Amazone, un groupe d’activistes féministes radicales très engagées contre les prostitueurs, suivait pacifiquement le cortège derrière Osez le féminisme ! et le Collectif féministe contre le viol, elles ont été violemment prises à partie par des groupes d’activistes pro idéologie du « travail du sexe ». Sur une vidéo de l’Amazone,

publiée sur les réseaux sociaux, les images, d’une grande violence, sont sans ambiguité.

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On voit un homme qui enlève son drapeau du bâton pour s’en servir pour frapper des militantes. Ensuite, une femme, avec des lunettes (qui sera identifiée plus tard comme appartenant à la commission LGBTI du NPA, notamment grâce à une photo où elle pose à côté de Philippe Poutou et Thierry Schaffauser, salarié du STRASS), fonce sur les Amazones, pousse l’homme et frappe violemment une manifestante. Les attaques se poursuivent par l’agression d’Anissia Docaigne-Makhrof, de l’Amazone Paris, victime de coups et tentatives de morsure. Les manifestantes agressées ont porté plainte jeudi 10 mars.  Parmi elles, outre l’Amazone, une activiste du groupe Résistance lesbienne.

Anissia explique qu’elle n’a vraiment réalisé la violence que le lendemain. Elle raconte : « Quand elle m’a sauté dessus (mon agresseuse, NDLR), j’étais en train d’essayer d’empêcher un homme de frapper Pauline (une autre victime directe). Les images montrent bien que ce n’est pas moi qui frappe. C’est dingue de voir la violence qu’ils ont en eux pour nous faire mal, la manière dont elle a cherché à me mordre était sidérante. Heureusement, au bout de quelques secondes, des gens, des deux côtés nous ont séparées ».

Pour elle, pas de doute : « ils se sont énervés tout seuls, aidés par des assos qui les attendaient. C’est Act Up et le STRASS qui ont mis le feu aux poudres. On n’a pas bougé du cortège ».

Les témoignages recueillis de militant·es abolitionnistes de CAP international, du Mouvement du Nid et de la Fondations Scelles corroborent les dires d’Anissia.
Un témoin : « Quand on est arrivés à République, ça s’est espacé entre les différents groupes. Je marchais avec d’autres militantes et A., survivante de la prostitution. On était juste derrière les Amazones.

On a vu un militant connu du STRASS rameuter du monde en nous voyant arriver, commençant à crier des slogans hostiles. Ils se sont placés derrière nous. Les agressions ont commencé au bout de la place de la République ; j’ai vu la personne du NPA, venue agresser en premier. J’ai vu les coups échangés. Elle n’était pas toute seule. Il y avait des petits jeunes masqués type antifa. Et des très très jeunes avec des T-Shirt Act-up ».

Je suis allée voir A., qui était bouleversée. Elle, n’a pas reçu de coups, mais a vu ses amies agressées. Elle était très mal ». A., qui le lendemain, avait encore du mal à en parler, témoigne également. « J’ai surtout eu peur pour mes amies, moi je n’ai pas eu de coups directs, mais j’étais choquée ».

J, autre témoin, n’a pas directement vu les coups, mais observé, tout le temps de la manif, le harcèlement par des militant·es anti-abolitionnistes. « Ce que j’ai vu, c’est Thierry Schaffauser et son groupe qui attendaient délibérément qu’on passe. C’est là où les tensions ont commencé. C’est de ce groupe que les agressions verbales sont parties. Ce que j’ai vu, c’était que le groupe était positionné sur le côté de la rue, et n’a rejoint la manifestation qu’au moment du passage des militant.e s abolitionnistes. » 

H. une autre militante, a également eu des échos de violences dans les cortèges abolitionnistes, notamment en Espagne. Dépitée, elle déplore : « on dirait que le 8 mars devient la journée de violences envers les survivantes de la prostitution ».

Après la manifestation, Act-up et le Strass ont affirmé sur leurs réseaux sociaux qu’ils avaient été agressés, notamment en raison de pancartes « très violentes ». C’est totalement faux, selon les témoins. « d’ailleurs, ils ont filmé pendant tout le cortège. Mais aucune  de leurs vidéos n’est sortie, dit Anissia. Parce que les vidéos montrent bien que c’est nous les agressées. Nous n’avons jamais tenu aucun propos transphobe. Ils nous ont même accusé – niveau stratosphérique de mensonge- de leur avoir volé leur téléphone pour effacer les vidéos ! ».

8 mars

Toulouse : la terreur contre les femmes le 8 mars

Osez le féminisme 31 ! publiait, le 10 mars sur son compte Instagram un résumé de la situation :
« Nous dénonçons les multiples agressions dont nous avons été victimes à la manifestation toulousaine. Ce que nous pensions d’abord être une agression isolée d’une personne sur une de nos militantes (arrachage violent de pancarte abolitionniste et coup au visage) s’est transformé en un déploiement de stratégies de prédation pour nous encercler et nous agresser ».

P, Une militante, qui était au sein du cortège Osez le féminisme ! dans la manifestation au titre du Mouvement du Nid de Haute-Garonne, portait une pancarte « Quitte ton mec accro au porno ». Elle raconte : « Tout s’est bien passé pendant 2 heures, à part quelques slogans insultants. Mais vers la fin de la manif, d’un coup, une jeune femme s’est précipitée vers nous, en arrachant la pancarte que je tenais, elle m’a cogné violemment le visage  avec le tasseau. Elle a déchiré la pancarte et appelé d’autres à nous exclure de la manif.Elle nous poussait, essayait de nous frapper. Je lui ai  lancé « tu te rends compte que tu frappes une femme en manifestation féministe? »

Une autre militante, F, tenait une autre pancarte abolitionniste. Elle s’est jetée sur elle, a arraché sa pancarte, a renversé notre sono et mis des coups de pieds dedans, elle revenait à la charge à chaque fois. On a réussi à la faire sortir ».

Elle explique qu’elles ont ensuite été encerclées par plusieurs groupes de personnes, sans soutien de la part des associations organisatrices. Elles sont finalement reparties, « tétanisées et choquées », commente P. « J’ai rarement vu autant de haine et de rage. On avait peur, on ne se quittait pas, on a décidé de rentrer ensemble quand on l’a pu ».

Des agressions verbales anti-abolitionnistes ont également été rapportées lors de la manifestation à Strasbourg.

Le Mouvement du Nid et Osez le féminisme ! ont réagi à ces attaques dans des threads twitter et communiqués de soutien aux victimes, et en appelant toutes les féministes à refuser la violence dans les luttes.

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