Un « vote historique ». C’est le mot qu’a employé Aliza Lavie, la présidente à la Knesset de la sous-commission de lutte contre le trafic d’êtres humains et la prostitution, après le vote, le 19 juillet 2017, d’une proposition de loi prévoyant un plan de lutte contre la prostitution, des alternatives pour les personnes souhaitant la quitter et la pénalisation des clients.
Actuellement, seuls sont punissables en Israël le proxénétisme, la traite et la tenue de maisons de prostitution. Mais les choses pourraient bientôt changer si la proposition de loi venait à se transformer en loi tout court : « L’année à venir peut être l’année pendant laquelle Israël rejoindra les rangs des pays progressistes et mènera une réforme sociale et historique », a ajouté Madame Lavie. Le pays se rangerait en effet du côté des adeptes du « modèle nordique », Suède, Norvège, Islande, Irlande, France et Canada.
A priori, rien ne l’interdit puisque la proposition de loi a reçu un important soutien avec le ralliement de 71 députés, aussi bien de la coalition de droite au pouvoir que de l’opposition : « un cas rare de coopération à travers le spectre politique » a souligné le Jerusalem Post, ce qui n’est pas sans rappeler l’exemple français.
Ce résultat, qui vient au terme d’une réflexion d’un an du Ministère de la Justice sur la question de la pénalisation des clients, est aussi le fruit d’une dizaine d’années de travail de plusieurs députées (au féminin) et de leur conviction sans faille, notamment Zehava Galon du parti Meretz (gauche progressiste et pacifiste) et Aliza Lavie de Yesh Atid (parti centriste et laïc).
La « lap dance » également dans le collimateur
Aliza Lavie a profité de cette actualité pour franchir une étape supplémentaire. Elle a appelé le ministre de la sécurité intérieure, Guilad Erdan, à « redéfinir la lap dance (1) comme un acte de prostitution » afin de pouvoir interpeller les propriétaires de lap dancings pour proxénétisme. Ce dernier a exprimé son accord et demandé au Ministère de la justice et au Parquet de mettre fin à cette « industrie de l’exploitation et de l’abus ».
Cette initiative fait suite à un jugement sans précédent rendu par une Cour de Tel Aviv le 28 aoùt 2017. Le tribunal a interdit un club de strip-tease situé dans le quartier des affaires de Ramat Gan au motif que ces établissements « objectivent les femmes dans un but d’excitation sexuelle » et qu’ils « ne doivent pas être considérés comme un divertissement ».
La question de la prostitution et de l’exploitation sexuelle semble donc prise au sérieux. Selon une enquête nationale menée en 2016, près de 12 000 femmes exerceraient la prostitution en Israël. Les revenus annuels du « commerce du sexe » s’élèveraient à près de 300 millions d’euros (chiffres 2014). Officiellement, la majorité des personnes prostituées, un peu plus de la moitié, seraient des femmes juives, israéliennes, des mères âgées de plus de 30 ans nées en ancienne Union soviétique.
(1) – Danse « érotique » pratiquée dans les strip clubs.