L’extrême droite : un danger pour les droits humains, un danger pour nos missions
Au Mouvement du Nid, nous œuvrons toute l’année sur le terrain auprès de personnes en situation de prostitution, en très grande majorité des femmes, qui sont parmi les plus précaires de notre société.
Les conséquences pour notre action associative, reconnue d’utilité publique, de l’arrivée de l’extrême droite au pouvoir seraient immédiatement concrètes et dévastatrices : sur le plan politique avec des idées contraire à nos valeurs humanistes et féministe fondamentales, des politiques publiques mettant en danger les personnes prostituées et la mise à mal des financements dévolus à la lutte contre le système prostitueur, déjà inférieurs aux besoins, ce qui mettrait en danger :
- Nos capacités d’accompagnement des milliers de personnes prostituées chaque année,
- Nos actions de prévention des violences sexistes et sexuelles, de sensibilisation pour une société qui défend les droits des plus vulnérables
- Notre plaidoyer pour l’application de la loi abolitionniste.
- La loi de 2016 elle-même, qui reconnaît la prostitution pour ce qu’elle est, une violence, qui a fait l’objet de tant d’années de luttes ; mais surtout les milliers de personnes qu’elle permet de protéger, seraient demain directement en danger.
Au quotidien aux côtés des personnes prostituées
Nous sommes au quotidien auprès des personnes prostituées, pour défendre leurs droits et leurs accès à la santé, la justice, au logement, au travail et à la formation, au sport… C’est tous les jours que nous constatons l’étendue des dégâts des réseaux de traite, de proxénétisme, des violences masculines, mais aussi des inégalités structurelles et des difficultés administratives.
Nos équipes bénévoles et salariées agissent avec les personnes pour lutter contre ces entraves à leur liberté et leur dignité et pour leur garantir une société dans laquelle elles sont reconnues en tant que victimes de violences sexistes et sexuelles, respectées et entendues. Une garantie qui s’écroulerait avec le RN.
Plus largement, le RN représente un projet de société aux antipodes de la raison d’être du Mouvement du Nid. Nos valeurs intrinsèques sont fondamentalement opposées à celles de l’extrême droite.
La prévention des violences et la promotion de l’égalité : socles d’une éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle épanouie, mises en danger par l’extrême droite
Nous agissons contre les violences sexistes et sexuelles, encore trop largement répandues, qui sont les raisons principales et préalables à l’entrée en prostitution : en 2010 le Collectif féministe contre le viol, dans une étude faite sur les 187 appels de personnes prostituées (dont 88% de femmes) reçus à la permanence Viols femmes infos entre 1998 et 2007, révélait que 100% ont été agressées sexuellement avant d’avoir été exposées à la prostitution.
La psychiatre Muriel Salmona indique aussi que 70% des victimes de violences dans l’enfance deviennent à nouveau des victimes à l’âge adulte. Tous les témoignages que nous recevons (à retrouver dans notre revue Prostitution et Société) font état de ce parcours de violences traumatiques, renforcées par l’isolement, les ruptures familiales, la précarité, la migration : des facteurs qui aggravent la situation des personnes, les rendant particulièrement vulnérables face à des prédateurs, des proxénètes et des clients prostitueurs. Notre expérience de terrain nous conduit par conséquent à nous engager pour prévenir et lutter contre ces violences masculines.
Ainsi, en 2023 nous sommes intervenues auprès de plus de 19 000 jeunes en collèges et lycées dans le cadre de nos missions de prévention, et avons formé plus de 1000 professionnel·le·s et acteurs sociaux.
Dans une démarche d’éducation populaire, nous développons des outils pour aborder avec les jeunes les notions d’égalité, de consentement, de désir, de réciprocité, afin que chacun·e soit armé·e pour lutter contre les stéréotypes genrés mais aussi prévenir et repérer les situations de violences, la stratégie de l’agresseur, les risques prostitutionnels.
Nous avons acquis la conviction de terrain que c’est seulement de cette façon que chacun et chacune pourra avoir la possibilité de faire ses propres choix, en toute sécurité. La création de ces outils, tels que dernièrement “Y a quoi dans ma banane ?” a été rendue possible grâce à des financements publics.
De son côté, l’association « Parents vigilants », créée par des militant·e·s du parti d’extrême droite « Reconquête », attaque virulemment l’éducation à la vie affective et sexuelle, la présentant comme médiums de «grand endoctrinement»1Des enseignants dénoncent la pression croissante de « Parents vigilants », association créée par Eric Zemmour – France Bleu et en brandissant les menaces que représenteraient « l’enseignement de la théorie du genre » et « la propagande LGBT »2Le colloque de l’association « Parents vigilants » au Sénat suscite l’indignation à gauche (ouest-france.fr).
Les intentions régressives de l’extrême droite et leurs attaques systématiques visent à discréditer les combats pour l’égalité entre les femmes et les hommes. Stratégie de détournement connue et usée par les opposant·e·s aux droits des femmes, de telles orientations auraient pour effet de réduire à néant toutes initiatives d’éducation à la vie sexuelle et affective, condamnant de fait des millions de jeunes et futurs adultes à rester démuni·e·s et détruit·e·s face aux violences dont ils et elles pourraient être victimes.
Car la réalité est là : en France, 1 enfant sur 10 est victime d’inceste et de pédocriminalité, et on l’a vu, l’écrasante majorité des personnes en situation de prostitution ont été victimes de violences sexuelles dans l’enfance et/ou l’adolescence. Alors même que le recours à la prostitution des mineur·e·s augmente, malgré l’interdiction d’achat d’actes sexuels mise en place par la loi de 2016 (encore trop peu appliquée).
“L’inceste est un camp d’entraînement pour la prostitution”, Andrea Dworkin, survivante américaine
A quoi ressemblerait l’école, la scolarité et plus largement la prise en charge des jeunes s’ils et elles ne sont pas accompagné·e·s dans leurs questionnements ni dans la dénonciation des éventuels crimes sexuels commis contre eux et elles, s’ils et elles ne peuvent pas témoigner à l’école des violences dont ils et elles sont victimes dans le cercle familial ?
S’il ne leur est pas possible de déconstruire les dégâts déjà si dévastateurs de la prostitution filmée (les sites pornographiques étant visionnés par 63% des garçons de 15 à 17 ans et par 37% des filles, sondage Ifop 2017), des réseaux sociaux et des croyances sexistes qui nuisent à leur épanouissement ?
Aujourd’hui, l’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle est considérée par l’Etat comme un enjeu majeur de santé publique, de prévention des violences et de promotion de l’égalité.
Les temps d’information dédiés prévus par la loi depuis 20013 Art. L. 312-16 du Code de l’éducation introduit par la loi n°2001-588 du 4 juillet 2001 relative à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception. https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000032400741/2024-06-19/ n’étaient pas suffisamment mis en oeuvre, ils viennent d’être récemment renforcés par la stratégie interministérielle de lutte contre la prostitution et l’exploitation sexuelle des mineur·e·s, grâce à laquelle tous les jeunes à partir de la rentrée devraient y avoir droit.
Les interventions en milieux scolaires sur ces questions sont assurées en grande partie par des associations agréées par l’Etat, telles que la nôtre, et permis par des financements publics : si demain elles ne le sont plus, c’est l’éducation des jeunes à l’égalité entre les filles et les garçons qui sera abandonnée. Pour préparer quel type d’adultes ?
L’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle prévient tous les types de violences sexuelles.
Citation Valérie, survivante québécoise, prostituée de 16 à 23 ans : “Il faut se rencontrer à mi-chemin dans une sexualité enthousiaste et heureuse, pas que la femme mette ses sensations en mode “off” pour être un réceptacle pour ce que l’homme veut”.
En France, 80% des femmes ont été victimes de harcèlement sexuel masculin dans les lieux publics (sondage Ipsos 2021), et une femme sur 3 en a subi sur son lieu de travail (sondage Ifop 2018).
Pourtant, Jordan Bardella et ses acolytes ont spécifiquement voté contre une résolution sur la prévention du harcèlement sexuel au sein du Parlement Européen en 2021. En France, lors des débats sur la “Loi Travail” en 2016, deux sénateurs frontistes (David Rachline et Stéphane Ravier) avaient choisi d’entraver la lutte contre le harcèlement sexuel en déposant (puis retirant) des amendements estimant que l’article de loi en question “favorise un système procédurier où des personnes mal intentionnées pourraient s’engouffrer dans la brèche pour accuser leur employeur”4http://www.droitsfemmescontreextremesdroites.org/spip.php?article8#nb1. Pour eux, l’impunité des agresseurs et le discrédit de la parole des femmes victimes sont donc la règle.
On peut dès lors imaginer de quelle (absence de) protection les filles et les femmes les plus démunies auraient droit dans un tel contexte, quand face à des clients prostitueurs ou des proxénètes, voire à la société, elles sont déjà stigmatisées et maltraitées (64% des personnes en prostitution sont victimes d’injures et de violences psychologiques, étude ProSanté 2013).
Audre Lorde, autrice afroféministe et lesbienne : “Je ne suis pas libre tant que n’importe quelle autre femme est privée de sa liberté, même si ses chaînes sont très différentes des miennes ».
Avec les personnes prostituées : les conditions de notre accompagnement inconditionnel et féministe, largement dégradées avec le RN
Nous sommes humanistes et féministes, car nous croyons en l’égalité entre les femmes et les hommes. Nous savons que les inégalités socioéconomiques qui nous séparent encore sont le fruit de constructions culturelles et non innées, et qu’il n’y a pas de fatalité aux violences ou aux difficultés que les femmes, souvent mères isolées, rencontrent.
Nous allons à la rencontre (sur tous les lieux de prostitution, y compris sur internet) et accueillons les personnes (en très grande majorité des femmes) prostituées dans les permanences de nos délégations.
En 2023, nous avons ainsi accompagné plus de 1800 personnes. Nous les accueillons de manière inconditionnelle, qu’elles souhaitent ou non sortir la prostitution, quel que soit leur parcours, leur origine, leur sexe ou leur identité de genre. Grâce aux financements de l’Etat (et des collectivités territoriales, ndlr) nous pouvons proposer à davantage de personnes de les accompagner dans toutes leurs démarches (administratives, sanitaires, etc), à leur rythme, en leur permettant de travailler leur rapport au corps, aux autres, et tendre vers du mieux-être.
Ces financements publics, permis notamment par l’existence d’une politique publique de lutte contre le système prostitutionnel et d’une loi considérant les personnes en situation de prostitution comme des personnes à qui l’Etat doit protection, nous permettent aussi de leur proposer, quand elles le désirent, des Parcours de sortie de prostitution (1247 délivrés depuis l’adoption de la loi en 2016), avec un titre de séjour, une allocation financière (encore trop peu élevée), des droits d’accès au logement, à la santé, au travail et à la formation…
La prostitution cible d’abord les personnes les plus vulnérables et/ou discriminées dans notre société : les femmes, les personnes victimes de violences sexuelles dans l’enfance, les personnes étrangères, pauvres, sans-abris, homosexuelles, trans, etc. Elles sont sur-représentées dans la prostitution.
C’est la raison pour laquelle par exemple, la majorité des personnes en situation de prostitution en France, et la majorité des personnes que nous accompagnons sont des femmes d’origine étrangère : ce seront les premières qui seront directement mises en danger si demain, l’extrême droite gouverne.
Au Mouvement du Nid, nous constatons chaque jour que la prostitution est le dernier bastion du patriarcat, dans sa forme la plus cruelle et décomplexée. L’étude Last Girl First de CAP International publiée en 2022 démontre ainsi à quel point le système prostitutionnel est à la croisée des oppressions : sexistes, racistes, classistes et capitalistes.
Des femmes migrantes (du Nigéria en Afrique subsaharienne, d’Europe de l’Est ou d’Amérique Latine en particulier) sont régulièrement envoyées par des réseaux de traite ou par leurs familles en France, sous la menace de devoir faire vivre leurs proches ou de régler des dettes (astronomiques), directement issues de leur exploitation sexuelle. Appauvries, sous emprise, victimes de violences multiples, elles cumulent les difficultés (précarité, barrière de la langue, isolement et errance), et la méconnaissance de leurs situations ou les préjugés sur la prostitution renforcent l’impunité de leurs agresseurs.
Un pays avec le RN au pouvoir signifierait donc un recul catastrophique pour les droits des femmes ; en particulier pour les plus vulnérables d’entre nous. En effet, le RN vote explicitement contre la lutte contre les violences faites aux femmes dans l’Union européenne (Rapport Zubert, 2014), ainsi qu’en France : en 2018, lorsque l’Assemblée nationale a adopté une loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, le RN était opportunément absent. Enfin, plus récemment, en 2023, les élu·e·s d’extrême droite se sont abstenu·e·s lors de l’adoption de la Convention d’Istanbul sur « la prévention de la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique ».
En 2013, Marine Le Pen, alors Présidente du Rassemblement national, disait à propos du projet de loi abolitionniste : « accorder à des prostituées repenties la régularisation de leur situation me semble être l’ouverture d’une nouvelle filière d’immigration. S’il suffit d’arriver en disant : ‘j’étais prostituée et j’ai arrêté’ pour avoir des papiers, on n’a pas terminé de voir arriver de nouvelles personnes irrégulières sur notre territoire»5Prostitution: Marine Le Pen contre la pénalisation des clients – L’Express (lexpress.fr).
Le mépris affiché pour les femmes victimes de violences voire de tortures (les deux tiers des personnes réfugiées auraient été victimes de violences, 35% auraient été exposé·e·s à des tortures dans leur pays d’origine, selon l’Observatoire de la Santé mentale, Vulnérabilités et Sociétés), n’a d’égal que la méconnaissance totale des conséquences de la réalité prostitutionnelle.
En effet, la majorité d’entre elles font état d’une santé très dégradée : 52% des personnes en situation de prostitution interrogées considèrent être dans un état de santé mauvais ou très mauvais (étude ProSanté 2013). Et selon une enquête de Médicos del Mundo en Espagne en 2023, seules 25% des femmes victimes de traite et de prostitution interrogées qualifient leur santé mentale de “bonne”6https://www.medicosdelmundo.org/blog/uncategorised/salud-mental-e-intervencion-en-contextos-de-prostitucion/ . Or le RN souhaite, entre autres, réduire l’accès à l’Aide médicale d’Etat ou réserver les allocations aux familles françaises : comment garantir leur accès à la santé et leur sécurité, déjà entravés, dans ces conditions ? A quel type de soins pourront-elles avoir droit avec un parti qui les déconsidèrent autant ?
Ces décisions, qui ne sont que des fausses solutions à des problèmes bien plus larges, les précariseraient davantage et aggraveraient leur situation, limitant conséquemment nos capacités d’orientations et de réponses à leurs besoins, dans un contexte social déjà très fragilisé.
Nous craignons également que le RN s’attaque à nos droits sexuels et reproductifs. Ses votes systématiques s’opposant ou s’abstenant de voter pour des textes législatifs soutenant l’égalité femmes hommes n’augurent rien de positif pour les femmes.
En Europe les eurodéputé·e·s RN se sont opposé·e·s deux fois à une résolution condamnant la Pologne pour son interdiction de l’avortement (2020 et 2021), et se sont abstenu·e·s pour l’inscription de l’IVG dans la Charte européenne des droits fondamentaux (2021).
En Italie, le parti d’extrême droite au pouvoir a fait adopter une loi autorisant les groupes anti-avortement à accéder aux cliniques pratiquant l’IVG et ainsi à désinformer et entraver les femmes dans leurs droits et leur choix7https://fr.euronews.com/sante/2024/04/24/litalie-adopte-une-loi-autorisant-les-groupes-pro-vie-a-acceder-aux-cliniques-davortement#:~:text=Golf%20Travel%20Tales-,L’Italie%20adopte%20une%20loi%20autorisant%20les%20groupes%20%22pro%2D,Rome%2C%20mardi%2023%20avril%202024..
En France en mars 2024, les élu·e·s ont été les député·e·s les plus nombreux (31, soit plus du quart des élu·e·s RN) à ne pas avoir voté la constitutionnalisation de l’IVG. En 2015, Aymeric Chaupade alors député RN, affirmait que “l’avortement [était une] arme de destruction massive contre la démographie européenne”8http://www.droitsfemmescontreextremesdroites.org/spip.php?article25 . Notons qu’en février 2023, le Planning familial de la Gironde avait été vandalisé 2 fois en 2 semaines, par un groupuscule d’extrême droite9https://www.francetvinfo.fr/societe/ivg/le-planning-familial-de-la-gironde-cible-par-un-groupuscule-d-extreme-droite-pour-la-deuxieme-fois-en-deux-semaines_5676986.html .
Pour rappel, les femmes en situation de prostitution sont 3 fois plus nombreuses à avoir recours à une IVG (61%) que le reste de la population féminine (22%) (étude de ProSanté en 2013).
La migration, déjà traumatogène, mais aussi la pauvreté sont, on l’a vu, des facteurs aggravants d’entrée en prostitution pour les femmes déjà victimes de violences. Avec un parti qui s’est abstenu de voter en 2023 pour la directive européenne sur la « transparence et l’égalité des rémunérations » entre les femmes et les hommes, mais aussi qui a voté contre le respect de la parité dans les institutions (2019), s’opposant ainsi à des vecteurs puissants d’émancipation économique et professionnelle pour les femmes, à quel avenir pourront prétendre celles qui sont déjà largement précarisées ?
Quelles possibilités auront-elles dans un monde où les inégalités structurelles seront renforcées ? En 2016 l’association « FIT, une femme un toit » qui gère un centre d’hébergement à Paris destiné aux jeunes femmes victimes de violences, a interrogé 108 de ses résidentes. 24 % ont confié qu’elles avaient eu recours à la prostitution contre un hébergement (98 % d’entre elles avaient été victimes de violences sexuelles auparavant).
Or le RN vote des mesures explicitement anti-pauvres. Le parti avait voté contre l’augmentation du smic en 202210Pouvoir d’achat: LREM, LR et le RN votent contre l’augmentation du SMIC proposée par la Nupes (bfmtv.com) ou pour la loi Kasbarian dite “anti-squat” (qui facilite notamment les procédures d’expulsion en cas de loyers impayés), quand on sait que 39% des personnes prostituées vivent dans un logement précaire (Etude ProSanté 2013) ou que par exemple pour les JOP celles vivant dans des squats ou des hôtels sociaux en Île-de-France sont “évacuées”, entre autres en “Normandie où les hébergements d’urgence sont désormais saturés”11Prévention de la prostitution pendant les JOP : un plan com et des formations – Les Nouvelles News, rendant impossible leur protection ; c‘est condamner de façon impitoyable les femmes les plus pauvres (et donc les femmes étrangères) à être victimes de toujours plus d’exploitations.
Le parti du RN s’attaque également quand il est à la tête de municipalités aux associations venant en aide aux plus démuni·e·s12A Hayange, le maire RN poursuit sa bataille contre le Secours populaire – Libération (liberation.fr) ou à la gratuité des cantines scolaires. L’extrême droite est l’ennemie par excellence des femmes, des personnes pauvres, et des personnes étrangères.
“ Rachel Moran, survivante irlandaise “Quand une femme est pauvre et a faim, la chose humaine à faire est de lui mettre dans la bouche de la nourriture, pas votre b***”
Nous refusons de voir les femmes et les personnes en situation de prostitution empêchées d’accéder à une vie digne sans contraintes (économiques, sexuelles ou physiques, administratives). Nous craignons que nos missions soient détériorées dans un environnement où le rejet de l’autre est légion, et que notre accompagnement, qui est au cœur de notre action associative depuis plus de 80 ans, devienne illégal avec le RN au pouvoir.
Contre le système prostitueur, pour pénaliser les responsables de la destruction des personnes prostituées, ce que ne permettra jamais le RN
Nous accompagnons les femmes qui le souhaitent dans leurs démarches juridiques contre leurs agresseurs, responsables des violences (proxénètes, violeurs, comme pour les affaires du porno français ou de la Villa Biron), en nous constituant partie civile auprès des victimes.
Rappelons qu’en 2016, les élu·e·s RN avaient voté contre la loi visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel en France, et qu’en 2023, un de leurs membres bordelais (François Jay, élu RN-Siel) a été mis en examen pour proxénétisme aggravé13https://www.francebleu.fr/infos/faits-divers-justice/un-ancien-elu-bordelais-d-extreme-droite-implique-dans-un-reseau-de-prostitution-6004615 . On peut donc s’interroger sur la place à laquelle auraient droit les femmes victimes dans une société dirigée par ce type de gouvernants.
Notamment avec un parti politique qui fait croire que seuls les hommes immigrés commettent des crimes sexuels, quand on sait que pour 9 victimes de violences sexuelles sur 10 en France, l’agresseur est un proche. Imaginons comment les clients prostitueurs et les hommes violents, déjà trop peu inquiétés ou condamnés pour leurs actes, seront traités (excusés ?), quand les faits ne peuvent résister à la réalité : les hommes de tous milieux, de tous âges et de toute catégorie socio-professionnelle sont représentés chez les acheteurs de filles et de femmes. C’est donc assurer l’impunité de ces hommes et priver les femmes de leurs droits qui fondent la politique du RN.
En 2013, Eric Zemmour, fondateur du parti d’extrême droite « Reconquête », signait La Tribune « Touche pas à ma pute »14https://www.liberation.fr/societe/2013/10/29/343-salauds-clament-leur-droit-a-leur-pute_943288/ contre la pénalisation des clients et pour la « liberté sexuelle » (de qui… ?). La même année Marine Le Pen, alors présidente du Front National, s’était exprimée contre la pénalisation des clients de la prostitution et qualifiait la prostitution du « plus vieux métier du monde », véhiculant par là l’un des clichés les plus éculés, erronés et dévastateurs pour les victimes de ce système mortifère.
Pour rappel, voilà comment les clients prostitueurs considèrent les personnes prostituées : “La prostitution traite les femmes comme des objets, pas des êtres humains. On doit faire en sorte que la personne se sente comme un “ autre ”, un véhicule, un trou à pénis, parce que c’est tout ce qu’elle est…” (un “client” cité dans l’étude mondiale de Mélissa Farley en 2022, réalisée auprès de 763 clients prostitueurs dans 6 pays, p.5315https://prostitutionresearch.com/wp-content/uploads/2023/03/Freiers_etude2022.pdf).
Alexine, survivante française d’inceste et de prostitution « Si prostituée est le plus vieux métier du monde pour les femmes, violeur est le plus vieux métier du monde pour les hommes ».
Pour lutter contre le proxénétisme et la traite des êtres humains, Mme Le Pen préconisait de « lutter à mort contre les réseaux mafieux étrangers », méconnaissant la réalité multiforme du proxénétisme : conjoints proxénètes, proxénétisme de proximité (entourage, loverboys), traite des êtres humains avec relai proxénètes dans chaque pays etc. Et surtout en invisibilisant ceux qui sont responsables de ce trafic de filles et de femmes : les clients prostitueurs, les acheteurs de personnes humaines.
Avec le RN au gouvernement, la lutte contre le proxénétisme sera instrumentalisée pour servir les politiques anti-immigration et xénophobes qui caractérisent l’extrême droite, ne résolvant rien de la problématique systémique de la prostitution. Aucune mesure ne sera prise pour lutter contre l’impunité des agresseurs. L’extrême droite n’a jamais été du côté des femmes, et ne le sera jamais.
Alors qu’au Mouvement du Nid, nous mettons en place des actions de sensibilisation et de plaidoyer sur tout le territoire : plus de 6000 personnes ont été sensibilisées en 2023 à la réalité du système prostitutionnel, grâce aux événements organisés par nos délégations, comme les cinés débats autour du film Noémie dit Oui, la campagne “Si mwen te sav” en Martinique ou l’organisation de procès fictifs. Nous avons aussi à cœur de relayer la parole des survivantes de la prostitution : leur podcast La Vie en Rouge, au sein duquel elles reviennent sur les causes et les conséquences de leur vécu prostitutionnel, comptabilise aujourd’hui 50 000 écoutes.
Nous œuvrons également pour la pleine application de la loi pour l’abolition de la prostitution (nous faisons partie du Comité de suivi interministériel référent sur la question et alertons régulièrement les institutions nationales et locales à ce sujet), notamment dans son volet répressif pénalisant les clients prostitueurs, responsables de la “demande” d’achat de filles et de femmes.
Nous croyons fermement à des valeurs de respect, de liberté, de solidarité et d’égalité, tant au niveau sociétal qu’au cœur des relations individuelles. C’est pourquoi nous nous engageons et serons toujours aux côtés des personnes prostituées, contre le système prostitueur, comme nous le faisons déjà depuis presque 80 ans. Un engagement définitivement incompatible avec l’extrême droite.
Une autre société, sans violences, est possible, et peut bénéficier à tout·e·s. La mobilisation est urgente, nous appelons toutes les personnes qui veulent agir pour les droits humains à rejoindre les futures manifestations et à voter, contre le risque du RN au pouvoir.