Dans un « live » Instagram, Zahia Dehar, 29 ans, s’est exprimée sur la prostitution. Son parcours, glaçant, résonne comme celui de milliers de mineures en France. Il est temps que le soutien nécessaire lui soit apporté, comme à toutes les victimes de prostitution.
Nous sommes le 11 décembre 2021 lorsque Zahia Dehar prend la parole sur son compte Instagram. Prostituée à 16 ans, elle est révélée au grand public en 2008 par l’affaire qui porte son nom. Certains parlent même, depuis « d’effet Zahia ».
Karim Benzema et Franck Ribéry, grands noms du football sont mis en cause pour avoir été ses « clients » prostitueurs ». Passibles d’une peine de prison pour prostitution de mineure, ils n’ont pas été condamnés. La justice a estimé qu’ils ne savaient pas qu’elle était mineure au moment des faits.
Treize ans plus tard, le traumatisme resurgit. « J’avais entendu dire que beaucoup de victimes de pervers narcissiques voulaient se suicider et je me rends compte que c’est vrai», explique Zahia en sanglotant. « J’ai même essayé de me tailler les veines il n’y a pas longtemps. C’est là, vous voyez, c’est ce que j’ai fait ». Elle montre son bras à la caméra.
On est loin de l’image policée de la star d’Une fille facile, le film de Rebecca Zlotowski récompensé à la Quinzaine des Réalisateurs du festival de Cannes en 2019. Car oui, derrière le fantasme de la prostituée, derrière la notoriété d’une jeune fille manipulée, propulsée dans le show-business, se cache une réalité violente.
Zahia raconte que c’est une « mauvaise rencontre » qui a fait de sa vie « un calvaire ». « C’est pour ça, finalement, que j’étais dans la prostitution à l’âge de 15 ans. Depuis que j’ai essayé l’amour, ce soi-disant amour, ce qui est censé être convenable pour notre société, je n’ai jamais été aussi humiliée et brisée. […] Je veux de l’aide, je vous en supplie, je ne sais pas quoi faire ».
L’ex-conjoint de Zahia Dehar, son proxénète ?
Le vendredi 18 février 2022, Zahia s’est à nouveau exprimée sur son compte Instagram (à plus de 250 000 abonnés). Elle donne des précisions sur le profil de son « lover-boy », ou conjoint proxénète : son ex-compagnon.
« Peut-être que je n’ai pas reçu de coups visibles, mais mon état psychologique est bien réel. […] Dès que je sortais la tête de la dépression, il m’y replongeait. ». Son proxénète, selon elle, était addict au sexe. Il l’aurait violée jusqu’à trois fois par jour. « J’avais mal, je hurlais, je lui disais : « Non, là ça me fait trop mal, je ne peux pas », il me forçait. […] Il me disait « si tu ne me satisfais pas je vais aller voir ailleurs », et après ce chantage, il me violait ».
Le récit de Zahia rappelle celui de tant d’autres femmes qui ont vécu la prostitution : un premier viol commis par le proxénète pour anéantir sa victime, avant de lui en faire subir d’autres par des « clients », et de continuer lui-même.
Lorsque « L’Affaire Zahia » a éclaté en 2010, Paris Match avait interviewé Zahia Dehar. Elle disait alors : « Je me considère comme une escort girl, mais pas comme une prostituée ». Celle qui, s’est fait un temps porte-étendard du « travail du sexe » semble aujourd’hui sortir la tête de l’eau. Bientôt reconnue comme victime de proxénétisme ? Aujourd’hui, Zahia pourrait porter plainte contre son proxénète. On espère qu’il sera condamné à hauteur de ses crimes.
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Note du Mouvement du Nid : L’accompagnement de l’association est inconditionnel. Tout appel à l’aide doit être entendu et c’est en ce sens que cet article est écrit. Que Zahia Dehar sache que quelles que soient les convictions ou prises de position passées d’une personne en situation de prostitution, la porte de l’association lui est et lui sera toujours ouverte.