Construisons un monde sans porno, sans prostitution. Voici la première partie d’une tribune qui nous a été envoyée par la survivante Florence Jacquet, qui avait déjà publié sur notre site la tribune « le féminisme est abolitionniste ».
Première partie : le porno, un maillon du système prostitueur
La liberté comme l’égalité, c’est pour tout-es ou pour personne
Le système prostitutionnel est une organisation patriarcale, dernier bastion d’une longue histoire où le désir de l’homme a toujours primé sur celui de la femme. Le féminisme est donc abolitionniste… puisqu’il remet le désir et la volonté des femmes au centre. Quant à l’abolitionnisme, il n’a jamais tué personne, alors que le système prosti-tueur tue tous les jours…
L’industrie du sexe est devenue au XXIe siècle un marché tentaculaire dont les ramifications ne cessent de croître avec les nouvelles technologies et l’avènement d’un capitalisme mondialisé. C’est un secteur pesant des centaines de milliards de dollars par an et qui repose sur l’exploitation de la personne humaine et de ses vulnérabilités (pauvreté, origine, migration,etc.).
Certaines personnes tentent alors de faire croire à la fois que la prostitution aurait toujours existé, qu’il y aurait empowerment possible, (une forme d’émancipation) : il n’est pourtant pas très progressiste de vouloir entretenir un marché de dominations, de violences et d’exploitation de la personne humaine… Cela relève plutôt du sexclavagisme.
La pornographie et la prostitution sont deux vases communicants.
L’industrie du sexe, qu’il s’agisse de bars de danseuses, de salons de massages érotiques, de peep-show ou d’agences d’escortes…est toujours la même. De la même manière, les images et films pornographiques, de plus en plus accessibles voire envahissants, participent également à ce système prostitueur, car il agit avec les mêmes ressorts (voir le récent rapport du HCE ou le témoignage de Nadia sur notre site NDLR).
Les nouvelles technologies contribuent à banaliser le système et à susciter une demande pour des femmes vulnérables et de plus en plus jeunes. La publicité est complice, par son hypersexualisation. Cette banalisation et cette omniprésence contribuent à la «sexualisation» de la société et ont un grand impact sur les pratiques sexuelles et l’estime de soi des jeunes garçons et des jeunes filles. Dans le porno, des centaines de milliers de femmes sont brutalisées et violées pour le plaisir du public masculin, qui cherche à reproduire ensuite les mêmes actes dans les relations sexuelles.
Le porno n’est pas du cinéma!
Les films pornographiques contiennent des violences physiques, sexuelles ou verbales non simulées contre les femmes. Culture du viol, misogynie, actes non simulés obtenus par l’argent : C’est de la prostitution filmée.
Plus de 2,3 M d’enfants consultent chaque mois des vidéos sur les sites pornographiques ! La fréquentation est en forte hausse. Les chiffres édifiants de l’Arcom montrent que : 51% des garçons de 12 ans consomment du porno (contre 53% des hommes). Forte hausse de +36% chez les mineurs depuis 2017.
La pornographie est devenue l’école du sexisme, comme le soulignait Sylvie-Pierre Brossolette, la présidente du Haut Conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes :« Il faut que cette école des violences sexistes qu’est la pornographie cesse. »En banalisant, en érotisant la violence sexuelle, elle forme les générations à venir à la culture du viol.
Or le viol est une violence, c’est un crime. « Sur le viol, on a progressé, mais c’est une violence visible. Tandis que la prostitution, on l’habille comme un choix. Et c’est cela qu’il faut combattre radicalement», disait Gisèle Halimi. Ces violences porno-criminelles doivent cesser, les femmes victimes être protégées, les vidéos illégales être retirées (90% des contenus).
Nous devons dire non à l’industrie du porno, qui cultive la culture du viol, et aussi le sexisme, le racisme, la torture, les lgbt-phobies, De nombreuses femmes prostituées mentionnent l’influence de la pornographie sur les demandes de plus en plus précises, et de plus en plus dégradantes, déshumanisantes, qui leur sont demandées par les prostitueurs. Avant de faire le choix d’acheter un acte sexuel, chaque homme devrait se souvenir que la prostitution tue tous les jours dans le monde.
Face à cette banalisation persistante, nous, les survivantes de la prostitution et du porno, demandons depuis deux ans et demi la phase 2 de la loi de 2016, et surtout un réel budget conséquent pour sa pleine et entière application, en n’oubliant surtout pas les clients prostitueurs sans qui il n’y aurait pas de prostitution.
Construisons un monde sans porno, sans prostitution ! Retrouvez la deuxième partie de ce texte, « ni un travail ni du sexe », ici