En trois ans, la loi a déjà changé beaucoup de choses!

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Trois ans après l’adoption de la loi du 13 avril 2016, deux mois après sa validation définitive par le Conseil constitutionnel, et alors que le Premier Ministre a rappelé l’engagement du Gouvernement dans la lutte contre le système prostitutionnel, les associations agréées par l’Etat pour sa mise en oeuvre se rassemblent pour présenter un bilan d’étape.

Nos trois associations, Amicale du Nid, FNCIDFF et Mouvement du Nid, sont agréées dans 40 départements (soit 60% du total) et participent aux commissions préfectorales multi-acteurs créées par la loi. Elles interviennent chaque année auprès de plusieurs milliers de personnes prostituées et mettent en place les premiers parcours de sortie. Fortes de cette expérience de terrain, nous pouvons dire que la loi a déjà changé beaucoup de choses pour les personnes prostituées, chez les professionnel.le.s, et pour la société dans son ensemble.

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La prostitution n’est plus un sujet tabou, et les personnes prostituées ne sont plus vues comme les coupables. Le fait que ce soit une politique publique reconnue est un progrès en soi, qui permet à tous les acteurs locaux de prendre conscience de la situation et de la nécessité de lutter contre la prostitution et d’aider les personnes, explique Hélène de Rugy, directrice de l’Amicale du Nid.

Depuis 18 mois, les commissions fonctionnent enfin dans près de 70 départements français. Rien que dans nos associations, 130 personnes ont pu bénéficier d’un changement de vie avec le parcours de sortie de la prostitution. 90% d’entre elles ont obtenu par ce biais un titre de séjour et une allocation financière complémentaire, ce qui est considérable au regard de la tendance du droit au séjour en France actuellement.
Ca me sauve la vie, Je vais être comme toutes les autres jeunes femmes, Aujourd’hui, je marche la tête haute, je peux à nouveau dormir sont quelques témoignages de personnes entrées en parcours de sortie.

Nous nous félicitons aussi que le proxénétisme soit jugé plus sévèrement, et que les victimes soient reconnues comme telles, comme l’a montré le récent procès de Poitiers. Grâce à la loi, les condamnations pour violences commises contre les personnes prostituées sont désormais plus fréquentes et plus sévères (voir dossier de presse).

Environ 3000 hommes ayant sollicité un acte sexuel ont par ailleurs été interpellés, démontrant que là où la pénalisation des “clients” est appliquée, elle est très efficace. Parmi eux, plusieurs centaines ont assisté à des stages “clients”. Les organisatrices/teurs de ces stages témoignent qu’ils contribuent réellement à faire changer de regard sur la prostitution. Rosen Hicher, survivante de la prostitution, intervient plusieurs fois par mois dans l’un de ces stages : Les stages clients, c’est une des choses les plus importantes de la loi. Et on se rend bien compte en ce moment qu’il y a une prise de conscience de la société. Quand ils arrivent à la fin du stage, les hommes réalisent qu’ils étaient complètement inconscients de la réalité.

La loi a également changé la donne en matière de prévention et permis l’émergence d’un sujet qui était jusque-là tabou : celui de la prostitution des mineur.e.s, un phénomène jugé en augmentation et qui devient une préoccupation importante. Les délégations du Mouvement du Nid agréées pour intervenir dans les établissements de l’Education nationale, tout comme les intervenant·es des CIDFF et de l’Amicale du Nid constatent une explosion des demandes d’interventions sur le sujet.

Plus profondément, le changement s’ancre au sein de la société française elle-même, comme l’a montré le sondage réalisé en janvier 2019 par IPSOS pour CAP international. Pour 78% des personnes interrogées, la loi est une bonne chose. Pour 71%, il ne devrait pas être possible d’acheter l’accès au corps et à la sexualité d’autrui.

Pour autant, nos associations attirent l’attention sur la nécessité de poursuivre les efforts et d’aller plus loin dans l’application de la loi. Partout où elle est appliquée, la loi fonctionne, elle donne des résultats et change la vie des victimes! Mais parce qu’elle est insuffisamment appliquée, trop de personnes restent encore sans alternatives à la prostitution.

Nous appelons l’Etat à affirmer une véritable volonté politique pour appliquer l’ensemble des volets de la loi, avec les moyens nécessaires. Le changement de société est en marche ; il faut le renforcer et l’accélérer.

Pour cela, nous demandons :

  • des logements en nombre suffisant, en urgence et pérennes;
  • un comité de suivi de la loi qui veille à son harmonisation sur l’ensemble du territoire;
  • une augmentation du nombre de travailleurs/euses sociaux/ales dans les associations agréées;
  • une augmentation du nombre de personnes employées dans la lutte contre le proxénétisme, y compris sur internet;
  • une harmonisation pour la délivrance de papiers, de titres de séjours pour les victimes de la traite et pour les personnes qui dénoncent leurs réseaux;
  • Des moyens pour renforcer la prévention;
  • Des campagnes de communication contre la marchandisation des êtres humains et l’achat d’acte sexuel.

Contact presse : Sandrine Goldschmidt 01 42 70 92 40