Welcome Europa

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« Welcome Europa » : un titre provocateur pour un documentaire qui veut montrer comment les immigrés en situation irrégulière dans les pays européens sont souvent contraints à la prostitution.

Au départ, Marocains, Kurdes, Roumains, Algériens, tous ont le même rêve : l’Europe et une vie meilleure.
Certains émigrent pour des raisons économiques, comme Allal, 16 ans, qui a quitté le Maroc moyennant 1000 € à un passeur, et qui voudrait trouver un travail pour nourrir sa famille restée au pays.

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D’autres fuient pour des causes politiques, c’est le cas de Mehmet, Kurde menacé en Turquie et qui, parti d’Italie, tente de rejoindre Calais pour passer en Angleterre.

Mais pour tous ces immigrés, l’histoire s’écrit sans : sans papiers, sans travail, sans logement. Le paradis attendu se résume à une vie d’errance. Séville, Amsterdam, Berlin, Paris, Marseille, la caméra de Bruno Ulmer ne fait pas la différence, elle qui filme les hommes et les corps au plus près, perdus au milieu de couleurs criardes qui tranchent avec le noir et blanc des séquences de témoignage.

Ces hommes disent la difficulté à s’en sortir, le racisme auquel ils doivent parfois faire face, la honte de l’échec quand il y avait tant d’attentes et la prostitution.
Avec un naturel déconcertant, des compatriotes de Allal, qui veut acheter un billet Séville-Amsterdam, lui conseillent de se rendre à la gare, lieu où se retrouvent les homosexuels de la ville.

« Les pédés, c’est comme les moutons, il y en a partout« , lui lancent-ils, avant de lui apprendre quelques rudiments d’espagnol qui permettront à l’adolescent d’entamer une discussion suffisamment explicite pour parvenir à ses fins.

Marius, qui vient de Roumanie, appelle femme et enfants avant, lui, de se résoudre à aller passer la soirée dans un club gay. Nombreux sont les Européens qui acceptent, semble-t-il, d’apporter leur « aide » aux clandestins en échange de services sexuels.

Si pour certains, la situation semble devenue anodine, pour les autres, c’est une blessure supplémentaire avec laquelle il faut vivre : « rester un homme, c’est pas facile« , avoue l’un, « pour que certains restent en vie, d’autres doivent mourir« , confie l’autre.

En traitant de la prostitution masculine des sans-papiers, Bruno Ulmer évoque un aspect rarement traité de l’immigration en Europe. Persiste cependant une interrogation : le recours à la prostitution est-il à ce point le lot des immigrés en situation irrégulière?