Xavier Emmanuelli, Axel Kahn et plusieurs médecins pressent les sénateurs/trices de souscrire au modèle abolitionniste

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Le Mouvement du Nid – France salue la publication dans le Journal du dimanche (28/03/15) d’une tribune intitulée « Dépénaliser les prostituéEs, pénaliser les acheteurs de sexe! », demandant aux éluEs de prendre en compte la dégradation de la santé qu’implique toute situation de prostitution.

Sous la plume de Xavier Emmanuelli, fondateur du Samu social, du généticien Axel Kahn, membre du Comité consultatif national d’Éthique, des gynécologues Israël Nisand et Emmanuelle Piet, également présidente du Collectif féministe contre le viol, nous lisons ces constats que notre association de terrain n’a eu de cesse de faire connaître : La prostitution est en soi une atteinte grave à la santé physique et psychologique qu’il faut faire reculer tout en protégeant ses victimes (…) Univers de violences, qu’elles soient le fait de réseaux de proxénètes ou des clients, et de contraintes, qu’elles soient financières, psychiques ou physiques, la prostitution est incompatible avec la définition de la santé sexuelle donnée par l’OMS.

Annonce

Les signataires, engagés dans les domaines du soutien aux victimes de violences sexuelles comme Muriel Salmona (association Mémoire traumatique) et dans la promotion de l’égalité Femmes/Hommes, comme Gilles Lazimi (membre du Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes) ou Jean-Pierre Frachet (militant de Zeromacho), assurent qu’ en matière de prostitution, le monde de la santé ne peut pas se contenter, comme le proposent certains, d’une approche de réduction des risques ou de la simple prévention des maladies sexuellement transmissibles.

En conséquence, ils appellent les sénateurs/trices qui vont examiner les 30 et 31 mars la proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel à voter en faveur du texte, rétabli dans ses 4 axes : Nous soutenons l’adoption rapide de politiques publiques permettant de renforcer la lutte contre le proxénétisme et la traite des êtres humains, de supprimer les mesures répressives à l’encontre des personnes prostituées et leur offrir un accès à de véritables alternatives, y compris pour les personnes étrangères, et enfin d’interdire l’achat d’un acte sexuel qui permet d’imposer un acte sexuel par la contrainte financière.

Le Mouvement du Nid – France, qui rencontre et / ou accueille jusqu’à 6000 personnes prostituées chaque année dans toute la France, constate que ces personnes souffrent d’atteintes à leur santé physique et psychique. Ces préjudices varient selon la situation des personnes mais ont toujours des conséquences désastreuses sur leur bien-être. Ils sont de véritables obstacles à la sortie de la prostitution. Nous nous réjouissons de la publication de cette tribune « Dépénaliser les prostituéEs, pénaliser les acheteurs de sexe! », qui contribue à la mise à jour des dommages physiques et psychiques liés à prostitution.

La santé des personnes prostituées ne doit plus être réduite au seul risque sanitaire. Elle passe au contraire par la construction d’alternatives pour les personnes prostituées. Elle exige d’en finir avec ces facteurs aggravants que sont la pénalisation des personnes prostituées et la complète impunité dont bénéficie les « clients », dont on sait qu’ils sont ceux qui exigent les passes sans préservatifs et multiplient les actes de violences.

Elles nous disent

Marion

Là-dedans, on perd pied. On n’a plus d’identité, plus de repères. Aller voir un médecin est difficile ; dire ce qu’on fait. On s’arrange entre copines, on se passe des médicaments.

Noémie

Mon corps a commencé à se couvrir de plaques d’eczéma tellement je ne supportais plus qu’on me touche.

Fiona

J’ai fait huit établissements en Belgique. [Dans] le dernier, il y avait deux Brésiliennes, réputées « tout faire sans ». C’était la publicité du bordel. Une des deux (…) bossait huit heures d’affilée. Sans préservatif. Ni les patrons ni les clients n’y voyaient d’inconvénient, au contraire ! J’ai parlé avec elle (…) Elle m’a répondu : Il faut bien mourir de quelque chose.

Mylène

Après je ne supportais plus le sexe. Une main masculine sur mon épaule me brùlait. Je n’ai plus eu aucune sexualité pendant trois ans. J’étais dans une anesthésie totale.

Laurence

Il y avait un client qui me payait avec de la coke. J’ai commencé à en prendre. Après, je me défonçais tous les soirs. Sans ça, je n’aurais jamais pu y retourner.

Témoignages extraits de Prostitution et Société n°179, dossier Prostitution, la santé dégradée