La rencontre
Rompre l’isolement prostitutionnel par une présence sur le terrain
La rencontre des personnes prostituées sur les lieux de prostitution est, chaque semaine, dans une vingtaine de villes françaises, au coeur de l’action de nos équipes bénévoles. En 2019, le Mouvement du Nid a établi près de 6000 contacts avec des personnes prostituées. En 2020, la crise sanitaire a rendu les sorties sur les lieux de prostitution plus difficiles. En revanche, la prise de contact avec des personnes via Internet a considérablement augmenté.
Depuis la naissance du projet du Nid, il y a plus de 80 ans, sa pensée, sa méthodologie et son action se sont construites avec les personnes prostituées. C’est auprès d’elles que le Mouvement du Nid a pu comprendre le système prostitutionnel, ses causes et ses conséquences. C’est avec elles qu’il a pu concevoir ses actions de soutien, d’alternatives et de prévention.
La plupart des personnes prostituées sont très isolées, quel que soit le lieu de leur activité. Certaines n’ont même plus aucun contact avec le monde extérieur à la prostitution : rupture familiale, rupture sociale… Dans ce contexte, le Mouvement du Nid est souvent la première étape vers une resocialisation. Nos membres se rendent sur les lieux de prostitution (trottoirs, bois, routes) et développent de nouvelles formes de rencontres (forums, SMS, petites annonces) afin d’atteindre les personnes les plus isolées, notamment sur Internet. Beaucoup de nos délégations départementales proposent également des permanences régulières, où l’on peut être reçu·e sans rendez-vous.
Notre démarche de rencontre des personnes prostituées
Nous proposons notre aide inconditionnelle à chaque personne, issue ou non de la traite, française ou étrangère, homme, femme, trans ou travesti·e.
Nous n’apportons ni biens, ni services (chocolats ou café, denrées alimentaires, préservatifs, consultations…) car nous voulons proposer une relation entièrement gratuite et sans contrepartie : ainsi, les personnes que nous abordons peuvent accepter ou refuser l’échange avec nous en toute liberté.
Ce sont en majorité les bénévoles qui vont à la rencontre des personnes prostituées. Le bénévolat permet un lien particulier avec elles, sur un registre différent, et complémentaire, de celui des travailleurs et travailleuses sociales. Ces relations que nous établissons ne sont pas formalisées par un contrat imposé par une institution ; elles se basent uniquement sur la confiance et la volonté des personnes, sur notre implication personnelle et la leur.
Pendant cette année de prostitution, il y avait une femme du Mouvement du Nid qui passait, Marie, mais je ne voulais pas lui parler. Je sentais l’alcool, j’avais honte. De toute façon, là-dedans, on se méfie de tout le monde. Un jour, elle m’a laissé son numéro de téléphone. C’est la présence de Marie, toutes les semaines, qui a fini par me mettre en confiance. Un soir où j’étais à bout, elle a essuyé mes larmes. Elle a entendu mon appel au secours. En tout, je suis restée sur le trottoir pendant treize mois. Tous les jours, sans exception. De 22h00 à 5h00 du matin. Je buvais une bouteille entière de vodka par nuit. Les clients, ils s’en foutaient. Celle avec qui j’étais venue s’est sauvée un jour avec un client. Moi j’ai fini par appeler Marie. Avec l’autre fille, on est allées la voir ; on a pris nos fringues et on s’est sauvées.