La Convention du Conseil de l’Europe prise entre deux feux

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La Convention du Conseil de l’Europe (COE) sur la lutte contre la traite des êtres humains est entrée en vigueur le 1er février 2008 dans les dix premiers États à l’avoir ratifiée (Aibanie,Autriche, Bulgarie, croatie, Chypre, Danemark, Géorgie, Moldavie, Roumanie et Slovaquie). Elle sera applicable en France le 1er mai 2008.

Cette Convention n’apporte pas de grands changements aux États qui en deviendront partie, particulièrement pour les États membres de l’UE.

La Convention précise d’ailleurs qu’elle « ne porte pas atteinte aux droits et dispositions du Protocole de Palerme » et que les États membres de l’UE continuent d’appliquer le droit communautaire en la matière : les décisions-cadres du Conseil de l’Union européenne de 2002 et 2004.

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Cet instrument juridique est, depuis son origine, le fruit de telles batailles de positions entre « libéraux-proxénètes » et « abolitionnistes » qu’il en est difficilement lisible.
Les Pays-Bas ont notamment tenté de faire disparaître le mot « prostitution » du texte et ont par ailleurs tout fait pour que la question des « clients » ne soit pas explicitement abordée dans l’article relatif à « l’incrimination de l’utilisation des services d’une victime« .

Il s’agit du dernier épisode de la bataille conceptuelle gagnée par les
partisans de la dépénalisation du proxénétisme et de la promotion de la prostitution.

On notera cependant ces dispositions intéressantes :

– L’article 19 prévoit que les États parties « envisagent » de conférer le caractère d’infraction pénale à « l’utilisation des services d’une victime » de la traite lorsque l’utilisateur a connaissance de son statut de victime.

C’est ici les « clients » prostitueurs qui sont particulièrement visés, même si on voit mal comment on pourrait prouver qu’un prostitueur avait conscience du statut de victime de la traite d’une personne prostituée qu’il a sollicitée.

– L’article 12-6 prévoit que « chaque Partie adopte les mesures législatives ou autres nécessaires pour s’assurer que l’assistance à une victime n’est pas subordonnée à sa volonté de témoigner« . Cet article devrait permettre de modifier les dispositions du droit français, qui subordonnent l’octroi potentiel d’un titre de séjour aux victimes de la traite à leur coopération avec les services judiciaires.

– L’article 15-4 prévoit que les États parties garantissent l’indemnisation des victimes et propose la création de fonds d’indemnisation des victimes de la traite alimenté par les avoirs découlant des peines imposées aux personnes condamnées pour traite des êtres humains.