Sorties militantes sur les trottoirs de Nice

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Soir après soir, les militantEs du Mouvement du Nid des Alpes-Maritimes tiennent le journal de leurs sorties à la rencontre des personnes prostituées.

Sous les abribus, sur les trottoirs, à l’entrée des stations d’essence, les militantEs vont par deux, généralement une femme et un homme, parler, écouter et distribuer la carte de l’association, en guise de main tendue et d’éventuelle promesse d’avenir.

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L’atmosphère est lourde : clients qui ralentissent, tournent, s’arrêtent, parlementent, négocient, insultent ; voitures qui déposent les jeunes femmes et viennent les reprendre, phares qui se mettent à clignoter quand elles parlent avec les militants (un signal qui les fait stopper net), individus qui observent ces derniers et les prennent à l’occasion en filature…

Il y a celles qui se détournent et ne veulent pas parler, mais aussi toutes celles qui ont un besoin immense d’échange et d’attentions : des sœurs, des cousines (trois du même village de Moldavie), des Roumaines, des Bulgares, des Moldaves, des Nigérianes, souvent scotchées à leur téléphone portable.

Il y a celles qui disparaissent pour laisser place à des inconnues. Celles qui délivrent des récits terribles : les agressions par de vrais cinglés, les actes d’auto-protection qui en disent long (l’une met des collants en plein été pour ne pas se faire tripoter) ; celle qui ne sait pas lire et n’est jamais allée à l’école ; celle qui appelle les clients des cafards

Les militantEs décrivent les soirées d’anniversaire passées au trottoir, les sanglots d’une « nouvelle », les talons aiguille sortis du sac, l’abattement et la tristesse, les insultes par la vitre ouverte des voitures (sales putains)… Dépositaires de confidences, ils écoutent et viennent en aide dans la mesure de leurs moyens : les unes disent avoir « fait » Paris, Bordeaux, Lille, Lyon, Marseille, et vu partout la même misère, les autres souffrent du manque de leurs enfants restés au pays, montrent leurs avis d’expulsion, racontent l’attente sans fin des papiers qui permettraient d’entrevoir un moyen d’échapper à la rue, expriment le désir de trouver un travail : n’importe lequel et j’arrête tout de suite ce boulot de merde.

Inlassablement, la délégation tisse des liens, jette des ponts, permet le dialogue, l’apprentissage de la confiance et de l’amitié. Un pas fondateur vers des contacts plus approfondis à la permanence et, qui sait, un jour, vers un autre avenir…